Les attaques terroristes du Hamas le 7 octobre 2023 ont replacé, de manière tragique, le conflit israélo-palestinien au centre de l’actualité internationale. L’Amérique latine n’échappe pas à cette réalité de guerre, qui se répercute dans le débat politique et sociétal.
La guerre entre Israël et le Hamas, à Gaza, engagée depuis les attentats terroristes du 7 octobre dernier, marquerait-elle le retour d’un engagement international de l’Amérique latine ? Depuis plusieurs années, ce continent s’était caractérisé par une forme de discrétion, accompagnée par une posture de neutralité, plus ou moins contrainte, sur le conflit entre l’Ukraine et la Russie, depuis le 24 février 2022. Une impression de « faux-fuyant » était perceptible tandis que le Brésil, avec le retour de Lula à sa tête, essayait de se présenter en leader. Jouer un rôle au sein des BRICS semblait devenir la vitrine d’un continent largement inaudible sinon oublié, des relations internationales1.
Les massacres de civils israéliens perpétrés par le Hamas le 7 octobre dernier et la guerre qui s’est enclenchée en suivant, ont fait voler en éclat cette posture. Nombreux sont les pays qui adoptent une position tranchée, assumée pour la première fois depuis des années.
Peut-être assistons-nous à un tournant géopolitique en Amérique latine pour laquelle la question palestinienne renvoie à des éléments identitaires nés dans les nombreux conflits qui ont façonné le continent depuis les indépendances du XIXe siècle.
Ils ont nourri en Amérique latine, une conceptualisation de la lutte armée, saisie à travers le prisme d’un déterminisme social qui appelle à l’exaltation des guerres d’indépendances, à une idéalisation du concept de « libération » nourrit une perception du monde, et une inclinaison globalement naturelle vers la notion d’un « sud global » qui reste à bâtir.
Les attaques terroristes du Hamas ont une conséquence immédiate : elles ont provoqué un phénomène d’accélérateur de prises de positions politiques. Plusieurs Etats comme l’Uruguay, le Paraguay, l’Argentine, le Costa Rica le Guatemala, le Panama, El Salvador et le Honduras les ont immédiatement condamné, tout en ayant des positions différentes sur Israël. Le Venezuela et le Nicaragua ont rappelé leur soutien à la « cause palestinienne » et condamné l’offensive israélienne.
Une posture en faveur d’une solution à deux Etats reste portée par la majorité des pays de ce continent éclaté, notamment par le Brésil et le Mexique, les deux premières puissances économiques continentales, aux côtés de certains pays andins tels l’Equateur ou le Pérou.
Mais là encore, les alternances politiques depuis 2019 et l’arrivée au pouvoir de gouvernement issu d’une nouvelle gauche sociale et traversée par une vision « alternative » sinon « altermondialiste », expliquent l’engagement accéléré et assumé sur la question de la guerre entre Israël et le Hamas.
L’Amérique latine est diverse : avec la région des Caraïbes, ce sont 33 pays et 600 millions d’habitants qui la composent. Mais pour la première fois depuis les années 2010 et la guerre en Syrie, l’Amérique latine donne le sentiment de s’engager résolument sur une actualité internationale. Les attaques terroristes du Hamas, placent la question du conflit israélo-palestinien dans le cœur d’un positionnement global. Elles réveillent un débat inédit, entre les Etats et replacent sur le devant de la scène, la présence d’autres acteurs internationaux que les seuls Etats-Unis.
Au fil des années, la Chine est devenue un des premiers partenaires économiques de l’Amérique latine. La Russie est parvenue à maintenir sinon consolider, ses positions notamment auprès du Nicaragua, du Venezuela ou de Cuba, mais également du Mexique ou de l’Argentine. Quid de la volonté de renforcement des BRICS, affirmée par le Brésil ? D’autres pays, tels la Turquie et l’Iran, se sont rapprochés de plusieurs pays parmi lesquels le Venezuela, renforçant l’image d’un puzzle éparpillé pouvant se recomposer autour d’une actualité essentielle des relations internationales.
Ce retour international semble s’effectuer sous couvert de principes fondateurs d’une identité contemporaine et en accord avec les réalités nationales de chacun des pays concernés.
Une accélération dans les prises de positions
L’Amérique latine n’est pas un continent anodin quand elle est comprise sous l’angle des conflits et des luttes armées. Entre une exaltation des guerres d’indépendances, une idéalisation du concept de la libération, également perçue dans sa dimension théologique, politique et culturelle, le continent latino-américain n’a eu de cesse d’être rattrapé par une perception manichéenne, renforcée par le rapport Est-Ouest, qui a longtemps semblé servir de boussole à l’heure des chocs internationaux. Les attentats du 7 octobre 2023 en Israël ont été condamnés par plusieurs pays latino-américains. Ils sont cependant perçus dans le cadre plus large du conflit israélo-palestinien, le Hamas n’étant pas, globalement dénoncé.
Au fil des semaines, les relations se tendent entre Israël et plusieurs Etats latino-américains : la Colombie dont le Président, Gustavo Pétro, a dès le 8 Octobre, rendu public une position polémique conduisant à des tensions avec Israël2. Le Honduras et le Chili ont rappelé, pour consultation, leurs ambassadeurs, tandis que la Bolivie a annoncé le 31 Octobre, « rompre » ses relations diplomatiques.
Les Présidents de la Colombie, Gustavo Pétro et du Chili, Gabriel Boric
Washington, 3 novembre 2023 (Droits réservés : El Diario de Hoy-www.elsalvador.com)
La marge de manœuvre est étroite : « les condamnations des attaques contre les civils » dans la bande de Gaza sont plus fréquentes, à l’instar du Brésil qui présidait le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies en octobre 2023. Ce pays a présenté, le 18 octobre une résolution qui appelait « à une pause humanitaire » entre le Hamas et Israël. Le Conseil de sécurité, comptant 15 membres, a rejeté le texte après le véto des Etats-Unis.
Si le texte « exhortait toutes les parties à pleinement se plier aux obligations du droit international, notamment les droits humains internationaux y compris dans la conduite des hostilités », il n’était pas fait mention « au droit d’Israël à se défendre ». Le ministre brésilien des Affaires étrangères, Mauro Vieira déclarait à l’issue du vote : « Après d’intenses et multiples consultations, nous avons présenté un texte qui a été accepté par 12 des 15 membres. Ce texte était essentiellement axé sur la cessation des hostilités et sur l’aspect humanitaire, en créant un passage humanitaire pour que les ressortissants de pays tiers puissent partir, dont nos 32 Brésiliens, ainsi que la possibilité d’envoyer de l’aide humanitaire. Malheureusement, cela n’a pas pu être approuvé »3.
Cette résolution était discutée tandis que le Président Joe Biden effectuait un déplacement en Israël les 17 et 18 octobre 2023. Elle était déposée après la présentation d’un texte par la Russie, rejeté par trois membres permanents (Etats-Unis, France, Royaume-Uni) et le Japon.
Manifestation de soutien aux Palestiniens, Mexico, 5 novembre 2023 (El Diario de Hoy-www.elsalvador.com)
Il n’existe pas de réaction commune latino-américaine. Dans un premier temps, la prudence se fait observer chez les premières puissances que sont le Brésil et le Mexique. Elles affirment vouloir s’inscrire dans la conformité au droit international et la solution à deux Etats. D’autres ont une attitude incisive et tranchée en faveur des Palestiniens comme la Colombie et le Venezuela, lequel va jusqu’à qualifier les bombardements israéliens de « génocide » de Palestiniens le 9 octobre, dans une déclaration télévisée après l’annonce par Israël « d’un siège total » de la bande de Gaza. Par ailleurs, des réactions de soutien à Israël sont exprimées en Uruguay, au Costa Rica et au Paraguay.
L’Uruguay est considéré comme « un des plus grands amis d’Israël en Amérique latine », comme le déclarait4 à Montevideo le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen, le 16 août dernier. Ce pays venait d’annoncer sa décision d’ouvrir un bureau d’intérêts à Jérusalem.
Manifestation en soutien à Israël, Bogota, 18 octobre 2023 (© El Diario de Hoy/www.elsalvador.com)
L’Argentine, pour sa part, compte la communauté juive la plus importante en Amérique latine, avec près d’un demi-million de personnes : les attentats contre l’ambassade d’Israël en 1992 et un centre communautaire juif en 1994 sont restés dans toutes les mémoires ; les enquêtes ont fait apparaître l’implication de l’Iran, rendant plus aigüe la compréhension des enjeux au Moyen Orient. Les trois candidats classés en tête des sondages, à la veille du premier tour des élections présidentielles argentines, ont dénoncé le Hamas et ses attaques terroristes5.
Quelles conséquences politiques en Amérique latine ?
Depuis le début de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, l’Amérique latine affiche une réserve qui traduit une forme de malaise. Le concept du « sud global » se développe. Il alimente une revendication de plus en plus affirmée, du rejet de la prééminence de l’Occident au nom d’une « libération » contre un « ordre international » établi au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. L’Amérique latine, dans la diversité qui la caractérise, donne cependant le sentiment de s’en rapprocher.
Les alternances politiques depuis 20186, la crise de la Covid 19, la présence de nouveaux acteurs, au premier chef desquels la Chine, contribuent à cette évolution.
Autant la posture était prudente sur le conflit entre Kiev et Moscou, autant la parole et les actes, se libèrent depuis le 7 octobre 2023.
Si le Guatemala, le Costa Rica, l’Uruguay, le Paraguay ont condamné sans équivoque les récentes attaques « terroristes » du Hamas, au lendemain, la plupart des pays se contentent d’appeler à se conformer au droit international. Le Venezuela, Cuba, le Nicaragua et la Bolivie constituent plus ouvertement un front anti-israélien soutenant la cause palestinienne, et considérant à l’instar de Caracas que « l’escalade de violence est le résultat de l’incapacité du peuple palestinien à trouver un espace dans le cadre du droit international pour faire valoir ses droits historiques »7, en appuyant en faveur de l’application de la résolution 2334 du Conseil de sécurité
8. 4. Souligne qu’il est essentiel qu’Israël mette un terme à toutes ses activités de peuplement pour préserver la solution des deux États, et demande l’adoption immédiate de mesures énergiques afin d’inverser les tendances négatives sur le terrain, qui mettent en péril la solution des deux États ».].
Le Mexique a condamné les attaques du 7 octobre, sans qualifier le Hamas de terroriste et en rappelant son soutien au principe de deux Etats. Le Brésil, première puissance économique sur le continent latino-américain, adopte également une posture médiane, appelant « à la désescalade » dans les premiers jours de la guerre non sans avoir condamné les attentats du Hamas après un échange téléphonique entre les Président Lula da Silva et Isaac Herzog, le 12 octobre. Membre non permanent du Conseil de sécurité, le Brésil s’aligne sur les positions de l’ONU. Par ailleurs, depuis son retour à la magistrature suprême le 1er janvier 2023, le Président Lula da Silva n’a eu de cesse de vouloir se poser en « leader » de l’Amérique latine sur la scène internationale, notamment en se servant de sa position de membre des BRICS ou du G20 dont il accueillera en Juillet 2024, le prochain sommet.
La guerre Est-Ouest avait fait de l’Amérique latine un front actif de la rivalité bilatérale. L’affaire des missiles de Cuba en octobre 1962, les conflits internes entre guérillas et gouvernements et les coups d’Etat avaient ponctué cette période faisant globalement apparaitre le continent comme globalement un allié de l’Ouest.
Les années 1990 avaient consacré, à la suite de la chute de l’ex-URSS, le modèle libéral. Depuis, les relations internationales se sont compliquées.
L’arrivée de la Chine, l’ouverture de certains pays à l’Iran ou la Turquie, la permanence d’inégalités sociales renvoyant à des difficultés structurelles révélées en partie pendant la crise des années 2010 et pendant la récente pandémie, constituent un terreau favorable, non seulement à un non-alignement sur l’Occident mais également à une diversification des alliances.
Le Président du Brésil n’hésite pas à remettre en question les organisations financières nées de l’accord de Bretton Woods de 1944.
La neutralité adoptée sur l’Ukraine laisse la place à un engagement sur le conflit entre Israël et le Hamas, entendu comme étant l’incarnation contemporaine du conflit israélo-palestinien. Nombreux sont les pays à avoir condamné les attentats du 7 octobre, mais la plupart d’entre eux ont très vite rappelé leur volonté de s’inscrire dans le respect du droit international afin de ne pas apparaître comme des soutiens à l’Etat d’Israël.
Si la logique de fronts ne s’est pas ancrée, c’est bien celle d’un glissement en faveur de la cause palestinienne et, avec lui, d’une compréhension du conflit à travers le prisme du concept de « libération » d’un « opprimé » qui se joue actuellement.
A cela plusieurs explications :
La réalité politique a évolué ces dernières années
Les alternances politiques en faveur des mouvements issus d’une gauche radicale, comme au Chili, en Colombie, au Pérou, au Brésil, ont contribué à renforcer la complexité du monde et la volonté de ne pas être entraîné dans un conflit qui aggraverait les situations interne.
Une perception de la guerre en partant des réalités nationales
Les pays qui réagissent le font en partant de leur propre situation nationale. Par exemple, le Président salvadorien, Nayib Bukele, connu sur l’ensemble du continent pour ses mesures radicales en matière de sécurité intérieure qui ont fait chuter le taux d’homicide de son pays à son niveau historique le plus bas, a dénoncé avec une grande clarté les attaques du Hamas, en faisant un parallèle avec la brutalité des « maras », des gangs violents contre lesquels il lutte depuis 3 ans. Le Président salvadorien a déclaré sur les réseaux sociaux, dès le 9 octobre, qu’ « en tant que salvadorien d’origine palestinienne (…), la meilleure chose qui puisse arriver au peuple palestinien est la disparition complète du Hamas. Ces bêtes sauvages ne représentent pas les Palestiniens. »9.
Ce message de conviction contraste totalement avec la posture de neutralité adoptée par ce pays dans le conflit en Ukraine, qui pouvait alimenter un climat de défiance avec les Etats-Unis.
El Salvador se trouve dans un environnement centraméricain tendu, entre d’une part le Nicaragua, où Daniel Ortega gouverne d’une main de fer et a réaffirmé son alliance avec la Russie, et d’autre part, le Guatemala plongé dans une confusion politique et judiciaire à la suite des élections présidentielles du 20 août 2023. El Salvador a fixé une ligne claire. Sans nul doute, va-t-il tenter d’influencer le Système d’intégration centraméricain (SICA) qu’il préside jusqu’en décembre 2023.
Pour sa part, et en miroir, le Président Gustavo Pétro a ouvert une période de fortes tensions avec Israël, qui est pourtant un pays partenaire historique de la Colombie dans le domaine de la sécurité.
A la suite de l’annonce par le ministre de la Défense israélien d’ « un siège complet » de Gaza afin de combattre les auteurs des attaques, le Président colombien écrivait : « C’est ce que les nazis disaient des Juifs. Les peuples démocratiques ne peuvent pas permettre au nazisme de se réinstaller dans la politique internationale ». Parallèle inacceptable pour Israël, qui décidait de convoquer l’ambassadrice de la Colombie et d’interrompre la livraison des équipements de sécurité. Assistons-nous à un changement d’alliance alors que la Colombie est un partenaire stratégique des Etats-Unis notamment dans la lutte contre le trafic de drogue ? Le Président Gustavo Petro, ancien membre de la guérilla du M19, pourrait-il privilégier une alliance avec le Venezuela et Nicolas Maduro, dans une logique alternative, tandis que ce dernier cherche à se faire réélire en 2024 au terme d’un mandat chaotique ?10.
Le Président colombien, affirmait, le 15 octobre dernier, dans une forme de surenchère par médias sociaux interposés : « S’il faut suspendre les relations extérieures avec Israël, nous les suspendrons. Nous n’appuyons pas les génocides. On n’insulte pas le Président de la Colombie. J’appelle l’Amérique latine à une solidarité avec la Colombie. Si elle n’en est pas capable, ce sera le développement de l’histoire qui aura le dernier mot comme pendant la grande guerre du Chaco »11.
Des enjeux régionaux
Les tensions entre la Colombie et Israël peuvent annoncer un basculement d’alliance dans une région stratégique. Le Président colombien a renoué avec le Vénézuéla depuis le mois d’Août 2022. Nicolas Maduro y a renforcé sa position politique avant les élections présidentielles de 2024. Il entretient des liens renforcés avec la Turquie et la Russie et n’envisage pas du tout de rompre avec l’Iran. Il développe un discours critiquant l’ordre international au nom de la « résistance » contre une forme de coercition imposée par l’Occident. Cette rhétorique se répand sur le continent qui apparait toujours plus fragmenté politiquement, l’intégration régionale ayant particulièrement souffert de la crise de la Covid 19. Celle-ci a contribué à renforcer les logiques nationales. C’est pourquoi, la guerre entre Israël et le Hamas peut fournir une nouvelle légitimité sur la scène internationale à une Amérique latine qui semblait être condamnée à devenir, depuis les années 2010, le continent oublié des grands acteurs mondiaux.
Depuis le 7 octobre 2023, le sujet n’est plus institutionnel et conceptuel. Il est politique. Il porte sur des alliances de sécurité et sur une vision du monde.
L’Amérique latine a, pendant des décennies, saisi à travers le prisme de la lutte sociale et d’une idéalisation de l’indépendance, les conflits internationaux. Le mécanisme se vérifie aujourd’hui, après les attaques du Hamas, dans le cadre du conflit israélo-palestinien qui y a reproduit les logiques de la bipolarité Est-Ouest dans laquelle elle fût entraînée.
Le Sommet de l’Alliance pour la prospérité économique des Amérique qui vient de se tenir à Washington, en présence de plusieurs chefs d’Etats latino-américains, a rappelé la complexité de la situation12 : les Etats-Unis restent, sur le continent, le principal investisseur. La géographie se vérifie à travers la crise migratoire contribuant à la permanence de liens qui obligent chacun à devoir composer.
Sommet de l’Alliance pour la prospérité économique/Maison Banche/3 novembre 2023
(© El Diario de Hoy/www.elsalvador.com)
Il est intéressant de noter la présence de Gustavo Pétro à la Maison Blanche tout comme la ministre des Affaires étrangères du Mexique, premier partenaire commercial des Etats-Unis…
Cette alliance économique vise sans doute, pour les Etats-Unis, à ralentir la pénétration du marché latino-américain par la Chine, mais également à consolider les économies locales contribuant à freiner le mouvement d’émigration vers les Etats-Unis. Mais, elle aura également des conséquences politiques. Elle pourrait conduire certains pays du continent à pondérer leurs positions internationales, contribuant peut-être à « endiguer » la vision idéalisée du « sud global » qui se fait entendre pour le moment sur le continent latino-américain.
Pascal Drouhaud
Spécialiste de l’Amérique latine
Chercheur associé de l’Institut Choiseul, il a fondé l’Association « LatFran » (www.latfran.fr).
- « L’Amérique latine, le continent oublié des relations internationales ? » par Pascal Drouhaud et David Biroste. Revue Politique et parlementaires, 2 novembre 2021 ↩
- Citation de Petro : « A la suite de l’annonce par le ministre de la défense israélien d’«un siège complet » de Gaza afin de combattre les auteurs des attentats, le Président colombien écrivait : «C’est ce que les nazis disaient des Juifs. Les peuples démocratiques ne peuvent pas permettre au nazisme de se réinstaller dans la politique internationale ». Parallèle inacceptable pour Israël, qui décidait de convoquer l’Ambassadrice de la Colombie et d’interrompre la livraison des équipements de sécurité. Depuis des semaines, les échanges acerbes par « tweets » interposés. Le 15 octobre 2023, le Président colombien affirmait : « S’il faut suspendre les relations extérieures avec Israël, nous les suspendrons. Nous n’appuyons pas les génocides. On n’insulte pas le Président de la Colombie. J’appelle l’Amérique latine à une solidarité avec la Colombie ». ↩
- Déclaration du ministre brésilien des Affaires étrangères, Mauro Vieira, le 18 octobre 2023 ↩
- Le ministre des Affaires étrangères israélien, Eli Cohen, s’est rendu à Montévidéo le 16 Août 2023 où il a rencontré le Président Luis Lacalle Pou et réaffirmé l’alliance bilatérale. Eli Cohen avait assisté le 15 août, à l’investiture du nouveau Président paraguayen, Santiago Pena. ↩
- Javier Milei, qualifié pour le second tour le 19 novembre prochain, a affirmé envisager de se convertir au judaïsme au lendemain des massacres du 7 octobre dernier. ↩
- Au Chili, Gabriel Boric, entré en politique dans le mouvement de gauche radicale Izquierda Autónoma, est élu à la tête du mouvement « Approbation, dignité, socialisme démocratique » à la Présidence de la République du Chili en décembre 2021 ; au Pérou, Pedro Castillo, pour « Pérou Libre » qui se présente comme marxiste léniniste, est élu à la tête du pays en Juin 2021 ; en Colombie, Gustavo Pedro, ancien guérillero d’extrême gauche au sein du mouvement M19, l’emporte en juin 2022 tandis que Inacio Lula da Silva devient Président de la République fédérative du Brésil après son élection en octobre 2022 contre le chef de l’Etat sortant, Jair Bolsonaro. ↩
- Communiqué du ministre des Affaires étrangères vénézuélien le 7 octobre 2023 ↩
- La résolution 2334 du Conseil de sécurité de l’ONU de 2016 « Réaffirme que la création par Israël de colonies de peuplement dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, n’a aucun fondement en droit et constitue une violation flagrante du droit international et un obstacle majeur à la réalisation de la solution des deux États et à l’instauration d’une paix globale, juste et durable ; 2. Exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et respecte pleinement toutes les obligations juridiques qui lui incombent à cet égard ; [… ↩
- Nayib Bukele est Président de la République d’El Salvador depuis juin 2019. Il a rétabli la sécurité dans son pays au terme d’une politique ferme de lutte contre les groupes de criminels, les « maras » (Mara Salvatrucha-MS 13 / 18 street gang). Il s’est abstenu sur le dossier ukrainien lors des votes de l’assemblée générale de l’ONU en 2022 et 2023. Le 9 octobre dernier, il a pris une position tranchée contre le Hamas dans un tweet en des termes clairs et faisant référence au groupe illégal salvadorien, MS13 : « Quiconque soutient la cause palestinienne commettrait une grave erreur en se rangeant du côté de ces criminels. Ce serait comme si les Salvadoriens s’étaient rangés du côté des terroristes du MS13, simplement parce que nous partageons des ancêtres ou une même nationalité. La meilleure chose qui nous soit arrivée en tant que nation a été de nous débarrasser de ces violeurs et meurtriers et de laisser les bonnes personnes prospérer. Les Palestiniens devraient faire de même : se débarrasser de ces animaux et laisser les bonnes personnes prospérer. C’est la seule façon d’avancer ». ↩
- Nicolas Maduro est Président de la République bolivarienne du Venezuela depuis avril 2013. Il a succédé à Hugo Chavez décédé un mois plus tôt. Candidat unique du parti socialiste unifié du Venezuela lors des élections présidentielles de 2018, il est réélu le 20 mai 2018 au terme d’une élection considérée comme frauduleuse par l’Assemblée nationale, plusieurs Etats latino-américains, les USA et l’Union européenne. Après plusieurs années de contestation politique, juridique et sociale, Juan Guaido, qui avait été reconnu Président du Venezuela par intérim en 2019 par la communauté internationale, n’est pas parvenu à s’imposer et Nicolas Maduro a conservé l’appui des forces armées et des structures de l’Etat. Juan Guaido a perdu depuis le soutien du parlement et Nicolas Maduro prépare les élections présidentielles prévues en 2024, tandis que la favorite de l’opposition, Maria Corna Machado a été déclarée inéligible, après avoir remporté les primaires, le 22 octobre 2023. ↩
- La guerre du Chaco : conflit entre la Bolivie et le Paraguay entre 1932 et 1935. La Colombie a voté une loi visant à apporter un soutien moral au peuple paraguayen ainsi que la nationalité colombienne si le Paraguay venait à disparaitre comme nation. Partenaire stratégique en matière de défense, les tensions avec Israël peuvent avoir des conséquences sur les relations avec les Etats-Unis qui ont érigé la Colombie au rang « d’allié majeur non-membre de l’OTAN » en 2018, quelques semaines avant la fin du mandat d’Ivan Duque. ↩
- Le Sommet de l’Alliance pour la prospérité économique des Amériques s’est tenu les 3 et 4 novembre 2023 à Washington. Les pays représentés étaient outre les États-Unis et le Canada, le Mexique, le Costa Rica, le Panama, la Colombie, l’Equateur, le Pérou, le Chili, la République dominicaine et La Barbade. ↩