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dans La Revue, N°1093, Politique

Tableau général des rapports de force à la veille des élections municipales

Bruno CautrèsParBruno Cautrès
10 avril 2020
L’écologie face au défi de la gestion municipale et métropolitaine

Les élections municipales des 15 et 22 mars 2020 s’annoncent particulièrement difficiles à lire et à analyser. Elles se dérouleront dans un paysage politique français qui ne s’est toujours pas re-stabilisé depuis la séquence électorale de 2017. La situation, depuis, est même devenue plus complexe encore.

Les élections municipales vont se dérouler dans un contexte politique et social particulièrement tendu. Crise sociale et crise démocratique rythment la France depuis plus d’un an et depuis l’explosion populaire des « gilets jaunes ». Les résultats des élections municipales vont, à cet égard, être particulièrement intéressants à analyser : à un moment donné où la confiance dans l’exécutif est basse, où les seuls élus qui paraissent incarner aux yeux des Français la proximité (les maires) semblent être pris par le doute, où la crise des vocations, le terreau de notre socle démocratique semble encore tenir par les racines que constitue l’enracinement local de la politique en France. Dans ce contexte que nous apprennent les grandes tendances de l’opinion et des dernières données disponibles à propos des dynamiques et des rapports de force à la veille de ces municipales ?

La mosaïque complexe des élections municipales

L’analyse des élections municipales n’est, de toute façon, jamais simple : c’est même sans doute, parmi les élections, les plus difficiles à analyser et à prédire.

La nature même de ces élections, à la fois locales et fortement influencées par les bilans des maires sortants, rend en effet la lecture nationale des élections municipales toujours complexe.

Il faut d’ailleurs se rappeler que l’on parle au pluriel des élections municipales : non seulement parce qu’elles se déroulent dans le maillage et la mosaïque de près de 35 000 communes mais aussi parce que la loi électorale varie selon un seuil de 1 000 habitants. La taille de la population des communes différencie en effet plusieurs des paramètres de l’organisation des élections municipales et agit notamment sur le mode de scrutin applicable (avec un seuil de 1 000 habitants) et le nombre de conseillers municipaux à élire. Le mode de scrutin applicable aux élections municipales est (depuis une loi de 2013) un scrutin majoritaire plurinominal avec panachage pour les communes de moins de 1 000 habitants et un scrutin proportionnel de liste avec prime majoritaire, pour les communes plus importantes1. La nouvelle loi électorale de 2013, entrée en vigueur pour les élections municipales de 2014, a maintenu par ailleurs leur statut particulier aux trois villes de France les plus peuplées (Paris, Marseille, Lyon) : dans ces trois villes, l’élection se fait par secteur électoral, en suivant les mêmes règles que pour les communes de plus de 1 000 habitants. Ces secteurs correspondent, à Paris et à Lyon, aux arrondissements tandis qu’à Marseille chacun des huit secteurs regroupe deux arrondissements (des conseillers d’arrondissement sont également élus). Enfin, les 15 et 22 mars prochains, des « conseilleurs communautaires » seront élus au suffrage universel direct en même temps que les conseils municipaux afin de désigner les membres des « organes délibérants des intercommunalités » : il s’agit d’élire les délégués d’une commune au sein du conseil des communautés de communes, des syndicats d’agglomération nouvelle, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines et des métropoles (chaque commune est représentée au conseil communautaire par un nombre de représentants tenant compte de sa population, selon des règles qui à nouveau varient selon le seuil des 1 000 habitants).

Comme on le voit, c’est en fait une mosaïque complexe d’élections municipales que nous nous apprêtons à commenter et à analyser les 15 et 22 mars prochains. Sans compter que, comme toutes les élections à dimension locale, un enchevêtrement des logiques territoriales pèse sur leur résultat. On ne peut en effet détacher les dynamiques politiques qui s’expriment dans une commune de celles qui existent dans les territoires où cette commune est située : bassins d’emploi ou zonage des activités économiques, cantons, département, régions et circonscriptions législatives. À titre d’exemple, il sera particulièrement intéressant d’analyser s’il l’on peut identifier un effet de la présence sur le territoire d’une commune d’un député de la circonscription, élu en 2017 : autrement dit, les nouveaux députés de LaREM élus en 2017 permettront-il aux candidats étiquetés « marcheurs » de bénéficier d’une dynamique favorable dans les communes qui se situent dans leurs circonscriptions ? Ou bien, les députés socialistes ou LR, qui ont survécu aux législatives de 2017 et qui sont déjà bien implantés, permettront-ils aux candidats de leurs formations de bénéficier d’un effet de contexte politique local favorable ?

La participation et l’abstention

Une donnée importante du tableau électoral à la veille des municipales concerne le taux de participation. Les élections municipales qui ont été longtemps sous la Ve République des élections mobilisatrices le sont moins, voire nettement moins, depuis les élections de 1989 et celles de 1995. Alors qu’entre 1959 et 1983 la participation au premier tour variait entre 78,9 % (municipales 1977) et 74,8 % (municipales 1959), on a constaté un brusque décrochage aux élections municipales de 1989 (72 % de participation) mais surtout à partir de celles de 1995 : depuis, la participation a varié, au premier tour, entre 69,4 % (1995) et 63,5 % (2014). Cette tendance à la baisse de la participation, aux élections municipales ou à sa stagnation autour des deux-tiers des électeurs depuis 1995, n’est d’ailleurs pas spécifique à ces élections ; la participation aux autres élections locales en France est même nettement plus faible : aux régionales de 2015 un peu moins d’un électeur français sur deux avait voté au premier tour (49,9 %), un pourcentage faible mais néanmoins à la hausse au second tour (58,4 %) ; la même année, les élections départementales de mars 2015 n’avaient également mobilisées qu’un Français sur deux (50,1 % au premier tour et 49,9 % au second tour).

Ces données confirment une tendance plus générale encore : les électeurs français, qui votaient au début de la Ve République par devoir, se déplacent aujourd’hui beaucoup plus en fonction des enjeux et de l’acuité de ceux-ci. La sociologie électorale a montré ce que cette tendance doit à des effets générationnels2 : dans les plus jeunes cohortes, la participation électorale est devenue plus « intermittente » et le « vote devoir » beaucoup moins systématique. À cette donnée, s’ajoutent les dimensions plus classiques de l’abstentionnisme électoral et leurs logiques politiques et sociologiques. Pour les élections municipales, ces données (le fait que les catégories sociales les plus défavorisées ou les moins politisées s’abstiennent davantage) peuvent être filtrées ou modifiées par le prisme du contexte local : si la participation est habituellement moins forte dans les grandes villes, un enjeu important ou un contexte municipal particulier peut faire varier les choses.

Enfin, on ne peut détacher les élections municipales de 2020 de trois éléments importants de contexte, susceptibles d’avoir un effet sur la participation électorale. Tout d’abord, la place de ces élections dans le calendrier électoral. Ces élections arrivent moins d’un an après les élections européennes du 26 mai 2019. Lors de celles-ci, la participation (50,1 %) avait été en net redressement (+7,7 points) par rapport à celle de 2014, sans pour autant retrouver les niveaux de 1994 (52,7 %), 1984 (56,8 %) et 1979 (60,8 %). Mais la cause première de cette augmentation de participation aux élections européennes était liée à un effet de calendrier électoral : comme Pierre Martin l’a remarqué, « pour la première fois les élections européennes étaient les premières élections intermédiaires dans le cycle gouvernemental, tout en étant précédées d’une année sans élection, sorte de diète électorale. Ces deux caractéristiques sont favorables à la participation de citoyens soucieux d’exprimer leur opinion et de remplir leur devoir électoral »3. Les élections européennes de 2019 ont donc en partie (limitée) « purgé » le besoin d’expression publique par la voie électorale, besoin renforcé par l’impopularité de l’exécutif. Cette impopularité structurelle et de niveau élevé constitue le second élément de contexte qui peut avoir un effet sur la participation : si le besoin d’expression par les urnes a, en partie seulement, été satisfait par les élections européennes, l’impopularité de l’exécutif et la crise sociale post « gilets jaunes » sont toujours bien là : après des semaines de mobilisations, de grèves dans les transports publics à Paris ou sur les réseaux ferrés, contre la réforme des retraites, quels sont les effets à en attendre sur la participation électorale ? La dimension de « vote sanction », habituellement observée dans les élections de mi-mandat (nous serons en fait à près de trois ans après la présidentielle de 2017), va-t-elle être renforcée pour toute une frange des électeurs ayant eu le sentiment de ne pas être entendus ? La dimension de soutien à l’exécutif va certainement fonctionner auprès du noyau dur du socle électoral d’Emmanuel Macron mais celui-ci a bougé depuis 2017 et s’est « droitisé ».

Le niveau de l’abstention va bien sûr jouer un rôle important dans les rapports de force entre électorats. Cet effet peut même être très substantiel sur les résultats globaux de ces élections municipales dans la mesure où LaREM ne dispose que d’électeurs de fraîche date tandis que les formations politiques des oppositions « classiques » (PS et LR) restent localement beaucoup mieux implantées et que le RN dispose d’un électorat très mobilisé et très fidèle. Les configurations locales, notamment à gauche, peuvent aussi avoir un rôle majeur sur la mobilisation d’un électorat tétanisé depuis l’effondrement du PS et qui, à présent, doute beaucoup à propos d’Emmanuel Macron (voire le rejette très clairement) : les dynamiques de rapprochement que l’on observe dans plusieurs grandes villes entre les formations politiques de gauche, même dans les cas d’une pluralité de listes (PS, LFI, PC par exemple) et plus encore les dynamiques propres à EELV peuvent bien sûr jouer un rôle, en tout cas dans certaines villes.

Les rapports de force

S’il est délicat de dresser aujourd’hui un tableau global des rapports de force, pour les raisons mentionnées ci-dessus, on peut néanmoins rassembler quelques données de base afin de se projeter déjà dans l’analyse des grandes dimensions qui seront issues des urnes les 15 et 22 mars prochains. On dispose de trois principales sources de données. Tout d’abord les enquêtes d’opinion à propos de la popularité de l’exécutif mais aussi des formations politiques. Bien que parfois non totalement concordantes, toutes les enquêtes d’opinion disponibles attestent d’une popularité basse du chef de l’État et même du chef du gouvernement. Ce paramètre joue toujours un rôle important dans le résultat des élections, et notamment des élections « intermédiaires » ou de mi-mandat. Selon les dernières enquêtes disponibles, le climat de l’opinion publique n’est pas très porteur pour la République en marche. D’une part, la popularité de l’exécutif oscille, selon les enquêtes, entre 25 et 33 % de satisfaction, ce qui est bas pour aborder un scrutin à mi-mandat passé. D’autre part, la popularité du mouvement présidentiel n’est pas non plus très élevée : selon la vague de décembre 2019 de l’Observatoire de la politique nationale réalisé par BVA pour Orange-RTL-La Tribune, la République en marche n’est créditée que de 33 % d’opinions favorables. Par ailleurs, l’absence de maires sortants LaREM et la lecture très brouillonne qui ressort de la stratégie de ce mouvement pour les élections municipales (alliances à droite, soutien tacite ou explicite à des maires sortants, listes communes ou pas avec le MoDem) privent le mouvement présidentiel d’une dynamique clairement identifiable pour les électeurs. Tout se passe comme si, contrairement aux objectifs affichés d’implantation locale, le seul objectif était de faire rentrer des conseillers municipaux dans des majorités variées et de miser, pour les grandes villes (notamment Paris et Lyon) sur un effet espéré mais très hypothétique de la sociologie du macronisme. Le pari que cette sociologie, clairement dans les grandes métropoles, amènerait mécaniquement à l’élection de maires LaREM en imposant aux partis politiques de s’effacer ou de laisser les têtes de liste à des candidats « marcheurs » ne semble pas, à cette heure, pouvoir être tenu.

Les enquêtes par sondages nationaux nous livrent d’autres indications précieuses à la veille de ces municipales : si l’image du Rassemblement national ne semble pas s’améliorer de manière significative (25 % seulement d’image positive dans la même enquête BVA), le parti de Marine Le Pen continue d’être perçu comme « le principal opposant à Emmanuel Macron » dans les enquêtes d’opinion. Cette qualification est une ressource de communication et de campagne électorale précieuse pour le RN qui va tenter d’incarner dans ces élections municipales le seul challenger à la République en marche. Cet objectif va néanmoins rencontrer une série d’obstacles : d’une part, bien qu’ayant clairement réussi une implantation locale lors des précédents scrutions municipaux, départementaux ou régionaux, le RN ne dirige toujours qu’une quinzaine de villes, géographiquement situées dans des territoires où le RN obtient ses meilleurs résultats (Pas-de-Calais, Var, Vaucluse par exemples) ; d’autre part, la stratégie du RN pour les municipales de 2020 consiste justement à concentrer son effort sur une dizaine de départements et à ne pas présenter de listes partout en France comme en 2014. Concentrée sur seulement quelques centaines de communes, dans des départements où le RN obtient de bons résultats, l’offre électorale RN ne sera pas présente dans tous les bureaux de vote ; enfin, l’image de Marine Le Pen comme de celle du RN continue de ne pas être structurée comme celle des autres leaders ou formations politiques : dans l’enquête BVA citée plus haut, le RN est le mouvement politique qui enregistre le plus fort pourcentage de mauvaises opinions (51 %) tandis que le Tableau de bord des personnalités réalisé par l’Ifop en janvier 2020 classe Marine Le Pen à la 22e place des personnalités politiques préférées (pourcentage de « bonnes opinions ») des Français. Si Marine Le Pen devance nettement dans ce classement Christian Jacob (n° 36), Olivier Faure (n° 44), elle est derrière Jean-Luc Mélenchon (n° 18) et surtout loin derrière Emmanuel Macron (n° 8 avec 40 % de « bonnes opinions » ce qu’il ne faut pas confondre avec sa popularité comme chef de l’État). Bien évidemment, les élections municipales ne sont pas le reflet de la popularité des partis politiques ou de leurs leaders et l’objectif, pour le RN, est avant tout de conserver les villes conquises en 2014 et de s’étendre dans les départements et les régions visés pour les prochaines élections départementales et surtout régionales de 2021. Il ne faut pas négliger non plus que le RN a gagné les élections européennes de mai 2019 et que la liste conduite par Jordan Bardella était arrivée en tête dans de nombreuses villes du Nord-Est et du Sud-Est : on compte 193 communes de plus 3 500 habitants (essentiellement dans le Nord, le Pas-de-Calais et le pourtour méditerranéen) où le RN a dépassé les 40 % lors des européennes et dans lesquelles il pourrait réaliser encore de bons scores, voire l’emporter lors des municipales.

Pour la droite, la situation s’avère plus complexe et nécessite de recourir à d’autres données que les seules enquêtes de popularité de ses dirigeants. Le point essentiel est qu’il faut partir de 2014 pour comprendre la complexité de la situation de la droite LR dans ces élections municipales. Il y a six ans, la droite LR avait triomphé : non seulement les listes de droite (divers droite/Union de la droite/UMP/UDI/MoDem/UDC) avait remporté près de 47 % des votes au premier tour, mais elles étaient parvenues à remporter de très nombreuses villes à l’issue des deux tours. Si la progression de la droite, par rapport à 2008, avait été moins spectaculaire que le nombre des villes remportées, la victoire de l’UMP n’en était pas moins très nette dans le contexte d’une défaite sévère pour le PS. En 2020, nombre d’élus LR dans les villes de 20 000 à 100 000 habitants vont donc se présenter en n’ayant effectué qu’un seul mandat (2014-2019). Or, les élections municipales créditent le maire sortant d’un « bonus » que l’on qualifie de « prime au sortant » dont le montant est d’autant plus important qu’il s’agit de leur première candidature à une réélection. Si le contexte national reste peu favorable aux LR (rappelons le score enregistré par la liste de François-Xavier Bellamy, 8,48 %), et que le montant de la « prime » risque d’être moins élevé pour leurs sortants, les résultats des municipales dans les villes qui sont soit de solides bastions de la droite, soit des terres conquises en 2014, seront nettement plus favorables. Un effet de contraste important peut même s’exprimer dans les municipales entre le nombre de villes maintenues LR et les difficultés du parti à incarner une alternative à Emmanuel Macron.

Une difficulté pourrait néanmoins obscurcir un peu le tableau pour les LR : il s’agit de la lisibilité des résultats dans les villes où a été conclue une alliance tacite ou formelle avec LaREM. Ce n’est donc qu’à l’issue du troisième tour (l’élection des maires par les conseils municipaux aux lendemains des municipales) que l’on pourra prendre la mesure de la victoire potentielle des LR lors de ces élections municipales. Par ailleurs le ratio entre les pertes, les gains et les reconductions jouera un rôle essentiel pour comprendre si les LR se dirigent vers une victoire en trompe l’œil ou vers un vrai redressement.

À gauche, la situation n’est pas parfaitement symétrique avec la droite : tout d’abord, la gauche part d’un point de départ nettement moins favorable : elle a enregistré une sévère défaite aux municipales de 2014. L’absence de dynamique nationale, malgré l’ampleur de la crise sociale en France, le fait que pour le moment ni le PS ni la France insoumise n’ont semblé en mesure de capitaliser sur la plus grande crise sociale qu’ait connue la France depuis plusieurs décennies n’est pas un bon signe. Pour le PS, qui avait « sauvé les meubles » en 2014 en se maintenant à la tête de quelques rares fiefs (notamment à Paris où Anne Hidalgo était parvenue à succéder à Bertrand Delanoë et où une « bataille de Paris » à forte connotation nationale et symbolique s’est engagée pour 2020 ; mais aussi à Strasbourg, Nantes, Dijon, Lille, Rennes, Lyon, Metz, Brest, Clermont-Ferrand), la situation est difficile : le rapport des forces s’est non seulement inversé lors de la présidentielle (où Jean-Luc Mélenchon a réalisé plus de trois fois le score de Benoît Hamon), mais l’alliance conclue avec Place publique pour les européennes n’a permis que de faire ex-aequo avec la liste de la France insoumise, pourtant affaiblie durement, et à un niveau historiquement catastrophique pour le PS. L’enjeu pour le PS est à présent celui de sa survie à travers son maintien dans ses fiefs à très haute valeur symbolique pour lui : si Paris ou Lille tombaient, le PS en serait affecté de manière presque vitale. Si quelques signes de rapprochement et d’unité en voie de reconstruction se manifestent dans certaines villes entre forces politiques de gauche, le message n’est pas pour le moment un message d’un projet politique en voie d’affirmation. Pour toute la gauche, et pas seulement le PS, ces élections municipales ne se présentent pas à ce jour comme celles qui en 1971 ou 1977 annonçaient un projet politique d’alternance en train de s’affirmer par le local et l’union des forces de gauche. La France insoumise n’est quant à elle pas très implantée au plan municipal, si ce n’est à travers les conseils municipaux d’union de la gauche et à travers ses accords locaux avec les socialistes et les communistes.

Mais le problème le plus épineux pour la gauche concerne les dynamiques internes à celles de la gauche au sens plus large encore et notamment la dynamique concurrentielle qui vient de EELV. Les élections municipales de 2020 pourraient, à cet égard, obliger les forces de gauche de se positionner vis-à-vis de EELV et réciproquement. Tout laisse penser que les résultats des candidats de EELV dans plusieurs grandes villes (par exemple à Bordeaux) pourraient constituer la grande surprise de ces municipales : pour un électorat de centre-gauche, désillusionné par Emmanuel Macron mais ne voyant pas de signes encourageants du côté du PS, le vote écologiste pourrait constituer une opportunité d’exprimer un « vote sanction » à dimension d’enjeux néanmoins : un vote « coup triple » permettant à la fois d’exprimer un mécontentement vis-à-vis de l’exécutif, une préférence de politique publique sur la question climatique et un signe en direction des forces de gauche pour enclencher une recomposition.

Pour conclure, on peut faire appel à une étude récente publiée dans le JDD, qui se base sur les méthodes de « l’inférence écologique », et qui a été réalisée par eXplain4, l’ex start-up LMP. Cette étude porte sur les transferts de voix entre les municipales de 2014 et les européennes de 2019. Cette étude montre trois éléments essentiels : la très forte loyauté des électeurs du RN d’une élection à l’autre (c’est l’électorat le plus loyal vis-à-vis de ses candidats), la forte dynamique de EELV vis-à-vis de l’électorat socialiste et enfin l’attraction d’une part significative de l’électorat LR pour la liste de Nathalie Loiseau aux européennes. Comme on le voit, les municipales de 2020 seront une étape de plus pour mieux comprendre la recomposition du paysage politique et partisan en France.

Bruno Cautrès
Chercheur CNRS au Cevipof
Enseignant à Sciences Po

  1. Antérieurement à la réforme de 2013, le scrutin proportionnel de liste ne concernait que les communes de plus de 3 500 habitants. La réforme de 2013 s’est également fixée des objectifs de parité hommes/femmes. ↩
  2. Sur toutes ces questions générationnelles en matière électorale, il faut lire les travaux de Vincent Tiberj et notamment : Vincent Tiberj, Ces électeurs qui viennent, Paris, PUF, 2017. ↩
  3. Pierre Martin, « Les élections européennes de 2019 en France », Commentaire, 2019/3, n° 167, pp. 537-544. ↩
  4. https://www.lejdd.fr/Politique/municipales- voici-ce-que-sont-devenus-les-electeurs-de- 2014-3940916 ↩

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