Le gouvernement de Michel Barnier en voie d’apparition après 15 jours pleins de consultations émerge. C’est peu dire que sa DLC (Date Limite de Conservation), pour reprendre l’expression du député Modem Richard Ramos, sera un de ses éléments à prendre en compte dans son espérance de vie. Tout porte à croire que ce gouvernement n’aura pas les coulées franches et restera soumis à de multiples pressions tous azimuts.
Sous influence
Officiellement, cette équipe gouvernementale a été composée avec le souci de l’équilibrage partisan. L’équilibre, ce maître-mot lui permettant de ne pas tomber à la première vague venue soit de l’extrême gauche, soit de l’extrême droite. Mais ce gouvernement est-il si équilibré que cela ? Si on entend par équilibre, la partition, gauche, droite, le terme déséquilibre serait mieux à même d’être utilisé. Si on ajoute que le centre qui aurait pu stabiliser l’édifice, n’est représenté qu’à la marge dans le casting Barnier, d’un point de vue partisan, l’équilibre ne semble pas être vraiment assuré. Le bateau tangue avant même d’être sorti du port et pour reprendre les propos de ce même député du Modem, décidément très en forme, Richard Ramos, il y a une surcharge, dans ce gouvernement Barnier du flotteur droit au détriment de celui de gauche, mais le coulage pourrait survenir par la coque centrale… tant Il est avéré que les relations entre Gabriel Attal et Michel Barnier ne sont pas au beau fixe.
Les petites piques de chacun des deux, l’ex et le nouveau locataire de Matignon lors de la passation de pouvoir ne sont pas passées inaperçues.
De tous bords partisans, de toutes les institutions, de l’Elysée (Emmanuel Macron), à l’Assemblée nationale (Yaël Braun-Pivet) au Sénat (Gérard Lâcher), sans oublier la Cour des Comptes (Pierre Moscovici), le gouvernement aura peu de marges de manœuvre pour conduire une politique qui n’aura reçu aucune légitimité par les urnes (Michel Barnier ne s’est pas présenté aux législatives en juin dernier) et dont on ne connait pratiquement rien des intentions.
Sous surveillance
La surveillance va être à 360 degrés. En externe, Bruxelles va dicter ses injonctions dans l’unique objectif de réduire les déficits publics et l’emprise de dette. Les dogmes économiques actés en 1992 par le traité de Maastricht prévoyant des « critères de convergence » tels que 3% de déficit et 60% de la dette par rapport au Pib, ne seront pas respectés. Les projections actuelles de l’INSEE font état pour 2024, d’un déficit représentant 5,5% du Pib et de 111% de la dette. Par conséquent, des mesures difficiles seront à prendre et c’est là que l’équilibre précaire va voler en éclat sous de multiples pressions internes. Du côté du RN, fort de ses 126 députés ajoutés aux 16 de l’Union des Droites (Eric Ciotti), le gouvernement sera soumis à ses mesures relatives à l’immigration et à l’abrogation de la loi sur les retraites. Cette dernière sera le point de convergence avec les partis de gauche. LFI/Nouveau Front Populaire (72 députés), les Socialistes et Apparentés (66 députés), les Ecologistes (38 députés), et la Gauche Démocrate et Républicaine (17 députés) n’hésiteront pas, à la moindre occasion de faire sombrer le gouvernement en le renversant par une motion de censure dont le RN pourrait être tenté de s’y associer.
Last but not least, le parti présidentiel Ensemble pour la République (97 députés), les Démocrates (Modem) qui compte 36 députés, Horizon et Indépendants (33 députés) seront eux vigilants à ne pas voir se détricoter la politique mise en place par Emmanuel Macron depuis 2017 et en cas contraire, leur soutien ne serait pas automatique.
En résumé, Emmanuel Macron qui espérait un second souffle pour son deuxième quinquennat en dissolvant l’Assemblée nationale, ne pourra pas compter sur ce gouvernement, tant celui-ci sera maintenu aux bons vouloirs des forces qui à tout moment, pourront le faire chavirer. Les questions restent celles-ci :
D’où viendra la vague fatale ?
Et qui prendra la décision de débrancher l’ appareil de respiration artificielle auquel ce gouvernement Barnier est raccordé ?
Dr Frédéric Dosquet,
Docteur en Sciences de Gestion,
Directeur de thèses (Hdr),
Professeur éklore-ed School of Management,
Auteur de Marketing et communication politique, EMS, 3eme édition.