Le 4 juillet 2017, à l’ouverture de la session extraordinaire, Édouard Philippe, Premier ministre, a fait une déclaration de politique générale en application de l’article 49, alinéa 1er, de la Constitution.
Affirmant que « le cap fixé par le président de la République est clair : dire la vérité et obtenir des résultats concrets le plus rapidement possible » il a défini les priorités du gouvernement et énuméré plusieurs mesures : la réforme de la justice, la Sécurité sociale, la politique de prévention de la santé, la garantie d’un égal accès aux soins, l’amélioration du congé maternité et des solutions de garde d’enfant, l’inclusion des personnes en situation de handicap, l’affermissement du lien entre l’État et les territoires, la réforme de la taxe d’habitation, un pacte pour les collectivités, afin de les accompagner dans la transition écologique et dans la transition numérique, l’organisation d’assises de l’outre-mer, l’accès aux biens culturels, la lutte contre le terrorisme et le renforcement de l’arsenal législatif, la sortie de l’état d’urgence tout en renforçant la sécurité, l’élévation de l’effort de défense à 2 % du PIB d’ici 2025, la réforme du régime de l’asile et une action en direction des pays d’origine et de transit, la réforme du baccalauréat, la rénovation du modèle social. Parmi les priorités du gouvernement, il s’agit de ramener le déficit budgétaire à 3 % du PIB. « Il y a une addiction française à la dépense publique » dont il faut « se désintoxiquer » a affirmé le Premier ministre. À cette fin, il entend conduire la stratégie de finances publiques « autour de trois règles simples : faire baisser la pression fiscale d’un point de PIB sur cinq ans, faire baisser la dépense publique de trois points de PIB sur la même période, et agir en donnant de la visibilité aux acteurs ». L’objectif est de stabiliser la dépense publique hors inflation, en 2018 par rapport à 2017. « Le gouvernement présentera à la fois le budget pour 2018 et une loi de programmation des finances publiques qui portera sur toute la durée du quinquennat. Cette trajectoire devra remettre la Sécurité sociale à l’équilibre à l’horizon 2020. […] Avec les réformes que nous vous proposons, nous voulons redevenir les premiers en termes d’attractivité, de croissance et de création d’emploi. » Le coût des charges pesant sur le travail sera abaissé et « le taux de l’impôt sur les sociétés sera réduit par étapes de 33,3 % aujourd’hui à 25 % en 2022 ». L’impôt de solidarité sur la fortune sera resserré autour du seul patrimoine immobilier, afin d’encourager l’investissement dans la croissance des entreprises. La réforme de la fiscalité du patrimoine sera complétée par la mise en place d’un taux de prélèvement unique d’environ 30 % sur les revenus de l’épargne. Un grand plan d’investissement de 50 milliards d’euros sera mis en œuvre dans les domaines de la transition écologique, du développement des compétences, de la santé, des transports, de l’agriculture et de la modernisation de l’État afin d’investir dans les secteurs d’avenir. S’agissant de la transition écologique Édouard Philippe a déclaré vouloir parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050, et annoncé la fin de l’attribution de nouveaux permis d’exploration d’hydrocarbures ainsi que la convergence diesel-essence dans cinq ans. La montée en puissance de la fiscalité carbone sera accélérée et les déchets mis en décharge seront divisés par deux ; 10 % des plastiques seront recyclés sur tout le territoire d’ici 2025. Le Premier ministre a annoncé un projet de loi et un plan d’action au printemps 2018 sur l’assurance chômage, la formation professionnelle et l’apprentissage. Un projet de loi présenté à l’automne 2017 visera à simplifier les procédures de construction des nouveaux logements. « Travaillons pour que nos compatriotes vivent mieux. Aucun des défis de la modernité ne doit nous effrayer », a conclu le Premier ministre avant d’engager la responsabilité de son gouvernement.
Richard Ferrand (LREM, Finistère) a appelé la majorité à travailler avec le gouvernement dans une logique de co-construction, « cela signifie que nous trouvions ensemble, très en amont, les solutions les plus adaptées, sans présupposé et sans que les propositions des parlementaires soient vécues comme une marque d’hostilité ».
Christian Jacob (LR, Seine-et-Marne) a reproché au Premier ministre d’avoir trahi sa famille politique et considéré qu’elle restera pour lui une vraie blessure. « Vous rêviez d’avoir votre groupe parlementaire charnière : il n’existe pas. Vous n’avez guère qu’une petite partie d’un petit groupe – petit, d’ailleurs, à tous points de vue. Quant au second objectif, casser la droite française, il a échoué aussi » a-t-il affirmé. Il a estimé que l’intervention la veille au Congrès du président de la République hier à Versailles démontre que celui-ci a décidé de tenir la bride très courte vis-à-vis de son Premier ministre. « Cette pratique nous trouble, non seulement parce qu’elle est une humiliation pour le Premier ministre, mais aussi parce que le président, en cassant les codes, joue dangereusement avec l’esprit et la lettre de la Constitution ».
Jean-Luc Mélenchon a déclaré qu’il ne voulait pas être seulement l’opposition mais « l’alternative au monde » qu’il représente. Il a récusé la politique de l’offre et de la contraction de la demande et considéré qu’allaient être disloqués cent ans de luttes et de compromis sociaux. Il a considéré comme un coup de force contre l’ordre démocratique du pays la transposition dans le droit ordinaire des dispositions de l’état d’urgence. « Coup de force en vue encore quand le président de la République menace les assemblées d’un plébiscite, si elles refusent de voter la réduction du nombre des parlementaires qu’il souhaite. » À la fin de l’intervention de leur président, les députés du groupe de la France insoumise se sont levés en brandissant chacun le code du travail.
L’Assemblée nationale a approuvé la déclaration de politique générale du gouvernement par 370 voix contre 69 et 129 abstentions. 305 membres du groupe LREM ont voté pour de même que 46 députés MoDem. 12 députés LC ont voté pour ainsi que 3 députés NG (Guillaume Garot, David Habib et Hélène Vainqueur-Christophe). 5 députés NG ont voté contre (Joël Aviragnet, Luc Carvounas, Alain David, Régis Juanico et Boris Vallaud), les autres s’étant abstenus. Parmi les 100 députés LR 75 se sont abstenus, dont Christian Jacob, 23 ont voté contre et 1 pour. Les 17 membres du groupe LFI ont voté contre. 12 des députés GDR ont voté contre, les députés ultra-marins s’étant abstenus. Les 8 députés Front national ont voté contre de même que Nicolas Dupont-Aignan, non inscrit. Olivier Falorni et Sylvia Pinel, non-inscrits ont voté pour. Jean Lassalle s’est abstenu ainsi que les 3 députés nationalistes corses.
Jean Lalloy
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