Aujourd’hui la Grèce commence son déconfinement progressif. Pour Vassia Loukou, les Grecs, comme dans les actes précédents, sont prêts à faire preuve d’exemplarité.
Les trois premiers actes de la tragédie grecque, tout le monde les connaît. L’acte I ou la révélation des faiblesses de la Grèce dans son adhésion à la zone euro. L’acte II ou l’austérité et la Troïka. L’acte III : la pandémie du Covid-19 et le confinement. Une triple malédiction, comme dans la tragédie des Atrides, où folie, ruine et maladie se succèdent.
La gestion de la pandémie par les hommes de sciences, dont le Dr. Sotiris Tsiodras, représentant du ministère de la Santé, dans la crise du SARS-CoV-2, par le gouvernement du Premier ministre, Kyriakos Mitsotakis, mais aussi par toutes les personnes impliquées, médecins, épidémiologistes et scientifiques, a été presque parfaite.
Peuple enthousiaste, parfois désinvolte, et quelquefois indiscipliné, les Grecs savent que le succès n’est cependant jamais très loin de l’échec, et que passer du premier au second fait mal, coûte cher, en argent et en vies. Mais personne ne pourra leur enlever le mérite de connaître aussi la valeur de la réussite, laquelle ne peut vous combler qu’au seul prix fort, celui de l’effort.
La crise du coronavirus qui frappe le monde entier a mis en évidence les caractéristiques traditionnelles de la société grecque.
Si celles-ci avaient été voilées par le mode de vie moderne de la course contre la montre du gain et de la reconnaissance sociale, si on les pensait disparues, elles ont ressurgi, sont re-nées de leurs cendres.
Le personnel de nos hôpitaux mène une lutte immensurable et épuisante, afin de prodiguer l’aide nécessaire aux patients atteints du coronavirus. Les pharmaciens sont à leur poste. Les municipalités déploient efforts et moyens pour nourrir les plus faibles. La police grecque demeure vigilante sans être totalitaire ni tyrannique. Nous voyons les acteurs de la restauration et de la distribution de vivres, constamment exposés au virus, être au service des citoyens grecs. Nous voyons les plus démunis, chômeurs et sans emploi ne pas perdre le sens de l’autre, le sens de l’humain. Nous les voyons résister. Nous croisons des donneurs de sang et autres bénévoles, dans les couloirs des hôpitaux, dans les quartiers où la nécessité est douloureuse. Enfin, nous sommes agréablement surpris par le geste de la Présidente de la Démocratie hellène, ainsi que par un grand nombre de députés nationaux et députés européens, maires, et autres agents gouvernementaux offrir 50 % de leur salaire des mois d’avril et de mai.
Aujourd’hui, la Grèce s’apprête à franchir le pas. Le déconfinement se fera en plusieurs phases. La société doit reprendre ses droits, sans oublier ses devoirs et responsabilités. Les citoyens, chacun séparément et tous ensemble, sont motivés et déterminés à poursuivre un même objectif, une même vision : continuer de donner l’exemple à ceux qui les ont sous-estimés, en adaptant gestes, faits et actes à la nouvelle réalité, pour en sortir victorieux et surtout guéris.
Car, si le saut vers le déconfinement est incertain, il n’en demeure pas moins nécessaire.
La Grèce entre donc dans la prochaine phase de gestion de la plus grande crise sanitaire, et ce à partir d’aujourd’hui. Elle se prépare à revenir à une vie sociale « régulière », mais nouvelle et différente, qui ne sera pas celle d’avant.
Dans ce défi majeur, les Grecs ne sont pas prêts à jeter le bébé avec l’eau du bain.
Ils savent que la question de la responsabilité individuelle se pose. Que sans cette responsabilité individuelle, la notion même de démocratie n’existe pas.
La Grèce est un pays meurtri mais qui s’est toujours élevé par sa poésie. Tout ne tient qu’à un fil. Et si la vie est souvent tragique, elle réserve aussi de belles surprises. La poésie et la force du peuple hellène ont montré que s’il le voulait, il était capable d’atteindre les objectifs qu’il s’était fixés. Objectifs qui parfois ne sont pas des moindres.
Vassia Loukou
Traductrice