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dans International, N°1098

Le rôle du latin dans l’histoire des maronites

Mireille IssaParMireille Issa
1 mars 2021
Le rôle du latin dans l’histoire des maronites

Bien qu’elle soit d’expression liturgique syriaque, l’Église maronite connaît dès le XVIe siècle l’infusion du latin dans son histoire. La Contre-Réforme qu’engage l’Église catholique pour se prémunir contre l’expansion de la doctrine protestante exhorte les cardinaux à renouer avec l’Orient des croisades que l’Europe avait déjà quitté depuis le XIIIe siècle. Missions, délégations, correspondance vont désormais scander la vie de l’Église maronite, qui suivra ce renouveau scellé à son début par la création du Collège Maronite de Rome, d’où partiront des savants maronites, auteurs d’une foisonnante production latine en théologie ou en histoire.

S’il semble encore pénible de préciser l’origine exacte des maronites, ces derniers ne peuvent pas réfuter les influences socio-historiques cumulatives, dont la synthèse a concouru à remodeler leur identité. Néanmoins, cette communauté est facilement identifiable grâce à deux sources : le territoire de genèse, à savoir le Liban qui correspond approximativement à l’ancienne Phénicie maritime, agrandie de parties de Syrie et de Palestine selon les aléas de l’histoire ; et les pays de diffusion des temps modernes, où la présence maronite finit par se faire remarquer. La centralité de saint Maron ou Mar Maroun fait de ce thaumaturge du IVe siècle1, familier de la ville de Cyr, une référence identitaire incontournable. Diminutif syriaque de mar ou « seigneur », qui donne son nom au monastère Saint-Maron sur l’Oronte, Maroun est un ethnonyme religieux conféré à une communauté, celle des maronites, retranchée dans les altitudes en quête d’autonomie et, en dépit de maintes controverses, porteuse d’une intrigante double identité, nationale libanaise, et religieuse chrétienne devenue catholique.

Les maronites jusqu’au XIIe siècle

Fils d’une communauté endurante, pétrie aux rigueurs de l’hiver et apprivoisant le sol rupestre, les maronites se voient inextricablement associés aux sommets enneigés du Liban, selon une tradition biblique qui associe ce dernier au blanc manteau de neige. Cette tradition en est concurrencée cependant par une autre, glosant l’antique toponyme moyennant son trilitère lbn, ou « encens ». C’est cette seconde interprétation que privilégient dans leur Bref Traité2

Gabriel Sionite et Jean Hesronite, deux maronites du XVIIe siècle, anciens disciples du Collège Maronite de Rome : Libanus… denominatus a vocabulo Syriaco Lbunto, quod Thus denotat non vero albedinem. Is Cedrorum suaveolentia, Machlabi plantarum, atque thuris prestantissimo odore, cæterarumque arborum atque florum fragrantia ita abundat, sicut in Canticis passim videre est, ut inde potius suaveolens quam albus denominandus sit.

Le Liban tire ainsi son nom du vocable syriaque lbunto qui signifie « encens », et pas vraiment « blancheur ». Il a en si grande abondance le parfum des cèdres et des plantes du mahlab, l’arôme extraordinaire de l’encens ainsi que la senteur suave d’autres arbres et fleurs, comme on peut le voir partout dans les Cantiques, que de là il est appelé « parfumé », plutôt que « blanc ».

Les deux traditions bibliques, rappelle Joseph Moukarzel3, proviennent précisément du Cantique, d’Osée et de Jérémie4, les deux premiers évoquant l’encens et les aromates, le dernier s’en tenant à la neige.

L’Église maronite syriacophone pour la période pré-arabe dut dès le VIIIe siècle, date de son arabisation, adopter en plus du syriaque, langue du quotidien et de la liturgie, une langue hybride dite garchouni, curieuse translittération de l’arabe en caractère syriaque. On peut présumer une pratique de dissimulation qu’adoptent les fidèles soucieux de protéger leurs livres sacrés contre l’indiscrétion des peuples arabophones. Cinq siècles plus tard, la communauté vit un tournant décisif historique, culturel voire eschatologique, dès son rattachement à l’Église catholique de Rome, lequel eut lieu en 1182 de l’aveu de l’historien principal des croisades, Guillaume archevêque latin de Tyr (1130-1187). Au milieu de ses préoccupations essentiellement historiques ou politiques, l’auteur de la monumentale histoire des croisades livre tout de même ses réflexions ethniques touchant aux communautés avec lesquelles il partage le même sol. On détecte en effet dans son Chronicon les échos des contacts établis par les maronites avec les Latins, dont le premier eut lieu en 1099 lors du passage des armées franques de Godefroy, encore comte de Flandres, aux confins de Tripoli, que surplombe le Mont Liban, résidence historique des maronites5. De pareilles attestations se renouvellent en qualifiant les maronites de fideles animés d’un sentiment de fraternæ caritatis, avant de se couronner du témoignage que dépose l’archevêque sur le retour des maronites en 1182 à l’unité de l’Église romaine. Sont clos ainsi cinq siècles de monothélisme, dogme de l’unique volonté divine dans le Christ, que les maronites semblent avoir auparavant observé6.

Il convient ici de reprendre ce qu’Harald Suermann estime être « les premières sources exhaustives sur l’histoire des maronites »7. Suermann évoque dans son Histoire des origines de l’Église maronite un ensemble de lettres échangées entre le pape Hormisdas et les évêques de Syrie Seconde, vers 517 ou 518, soit un peu plus d’un demi-siècle après le concile de Chalcédoine, probablement au temps de la fondation du monastère Saint-Maron, dont les moines jouent un rôle non négligeable dans la victoire du camp chalcédonien et contribuant à l’extinction du schisme entre Rome et l’Église de l’Est. Parmi ces lettres, figure celle que le pape Hormisdas adresse « aux presbytes, diacres et archimandrites de Syrie Seconde », dont la version latine appartient à la Collectio Avellana8, et dont il est possible de consulter la traduction chez Suermann lui-même9. Les intentions de l’Epistula se résument alors dans l’exhortation papale à fuir les hérésies et à « connaître et conserver le concile de Chalcédoine qui a le respect de tous ».

Le rattachement officiel des maronites à la juridiction catholique ne laisse de soulever des questions touchant de toute évidence à l’élaboration d’une identité complexe10.

Unie à la sainte Église romaine, mater et caput omnium Ecclesiarum comme le dit saint Irénée, l’Église maronite n’en est pas moins une Église orientale antiochienne pétrinienne, l’une des premières à se catholiciser, toutefois réfutant les allégations de Guillaume de Tyr qui parle de conversion maronite – n’est converti que le non-chrétien moyennant le baptême ! Quoiqu’il en soit, ce changement semble avoir pris dans l’histoire des maronites une ampleur si considérable que j’ose évoquer un processus de latinisation partielle, affectant non seulement l’obédience, mais aussi le rite, l’éducation humaniste et par conséquent la production littéraire. Décidément, les affirmations du Bullarium Maronitarum de l’abbé Toubia Anaissi, monument épistolaire11 que j’aurai l’occasion plus loin de présenter de manière plus circonstanciée, suffisent pour prouver qu’à peine quelques décades après la déposition de Guillaume de Tyr, l’Église catholique, soucieuse de la communion ecclésiale, engage l’uniformisation des dogmes et rites liturgiques. Je retiens à cet effet deux bulles de nature catéchétique. La première est la bulle V Quia divinæ sapientiæ datée du 1er février 1256, et envoyée par le pape Alexandre IV au patriarche maronite Siméon12. Elle répand une matière christologique qui exhorte les maronites à rejeter le monothélisme et embrasser les principaux articles de foi et rites catholiques dont, tout particulièrement, le Filioque ou procession du Saint-Esprit du Fils et du Père, l’unique invocation de la Trinité lors du baptême dans la triple immersion, la confession des péchés, l’utilisation des cloches pour distinguer les heures canoniales, tout comme le port du pallium, privilège pontifical, lors de la célébration des fêtes principales. La deuxième est la bulle XXXIII Benedictus Deus, écrite le 14 février 1577 par le pape Grégoire XIII au patriarche Michel Rizzi13. Elle évoque à son tour bon nombre de détails, entre autres la confection du chrême avec de l’huile et du baume, ex simplici oleo olivarum et puro balsam, et la réduction du trisagion, hymne des séraphins, à la triple acclamation « Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous », Sanctus Deus, Sanctus Fortis, Sanctus Immortalis, miserere nobis. Sans doute ainsi l’unification de la christologie et la liturgie exprime-t-elle dans les deux bulles l’intention d’assurer la cohésion des fidèles et affermir la primauté de la Sedes Apostolica, Siège de l’évêque vicaire du Christ, tête de l’Église universelle et père de tous les chrétiens.

Collegium Maronitarum         

Sur une étendue de trois ou quatre siècles, le règne répressif des mamelouks provoque l’étiolement des anciens contacts établis entre les deux christianismes d’Orient et d’Occident. Les contacts reprennent après le concile de Trente, lorsqu’en 1584 Grégoire XIII se résout à aider à la fondation du Collège Maronite, d’abord hospice, hissé ensuite en institut académique, réservé pour l’accueil de jeunes séminaristes venus du Mont Liban dans l’intention d’étudier à Rome théologie et belles-lettres. Ainsi donc, l’édification du Collège vient rebâtir les ponts avec l’Orient chrétien, qu’elle tente de soustraire aux séductions de la Réforme, par l’œuvre d’une Contre-Réforme dont la tactique consiste à intensifier les missions franciscaines et jésuites, tel que le signifie la densité de la correspondance pontificale avec le patriarcat. Dans ses Échanges culturels entre les maronites et l’Europe14, le père Nasser Gemayel fait la lumière sur le contexte historique. En effet, suite aux Capitulations que signe en 1535 François 1er avec Suleyman le Magnifique, et après la naissance du protestantisme, la papauté initie un mouvement de Contre-Réforme dont l’audacieuse poussée en Orient prend l’allure d’une nouvelle croisade. Si les Capitulations entendent défendre les intérêts de la France dans les Échelles du Levant, la Contre-Réforme tridentine menée au nom du catholicisme s’avère être à la fois le bras religieux qui protège ces intérêts, et qui œuvre à recentraliser l’autorité du Siège apostolique en ramenant les ouailles d’Orient autour de ses idéaux religieux. C’est dans cette optique qu’on peut comprendre pourquoi les Ordres catholiques, tout particulièrement la Compagnie de Jésus, multiplient leurs délégations. On justifie alors le choix de la Compagnie par la solide rigueur jésuite, seule susceptible de satisfaire pleinement le besoin de défendre l’Église romaine contre une Réforme intrépide. L’exemple de l’Italien Jérôme Dandini, envoyé spécial du pape Clément VIII, illustre bien la politique de Rome. « L’homme de relations et de gouvernement »15 tel que le décrit Sami Kuri dans ses Monumenta Proximi-Orientis achève sa mission et, dans son carnet auquel il donne le titre de Voyage du Mont Liban16, il consigne ses bonnes observations sur les mœurs des maronites du Liban du XVIIIe siècle.

Aussitôt l’ouverture sur les Églises orientales, sur celle des maronites notamment, porte ses fruits. Le père Gemayel situe en 1579 le premier convoi de disciples ayant accompagné Jean-Baptiste Éliano, suivi d’un second convoi en 1581, selon un stratagème soutenu par le jésuite espagnol, qui privilégie la formation à Rome d’un clergé local apte à remplacer les missionnaires. Besoin en est de créer une résidence fixe, vu le nombre croissant des disciples, si bien que le pape Grégoire XIII décerne à ces derniers une demeure dite Hospice de la Nation Maronite, devenue en 1584 le Collège Maronite Pontifical de Rome. J’ai déjà traité dans le Bullarium Maronitarum les deux bulles de Grégoire XIII insérées par l’abbé Anaissi. En effet, la bulle XL Exigit incumbentis nobis17

annonce le 31 janvier 1582 l’édification à Rome d’un hospice pour la nation maronite ; et la bulle XLI Salvatoris Nostri Jesu Christi18, datée du 13 janvier 1583, entend achever l’aménagement de l’hospice maronite dans la maison San Giovanni della Ficoccia. Bénéficiant de la protection du cardinal Carafa, qui cautionne un ensemble de constitutions qui réglementent la vie religieuse et académique des disciples, puis doté d’une bibliothèque appropriée, le Collège est ainsi destiné à accueillir à Rome des élèves maronites afin de leur fournir une sérieuse éducation humaniste. Il semble exaucer, comme le dit Aurélien Girard, les attentes de l’Église catholique par la création d’un cercle de savants pouvant faire fructifier leurs expertises linguistiques, en arabe et syriaque notamment, « pour mettre au jour des textes chrétiens qui nourrissent l’apologétique catholique, ou encore pour découvrir des sources antiques perdues dans les traditions latine et grecque »19.

Or à cette époque délicate de l’histoire de l’Église catholique, les maronites semblent être, parmi les chrétiens orientaux, les seuls à avoir perpétué les rapports avec Rome depuis les croisades.

Dans sa lutte contre le calvinisme, l’Église romaine, voulant renouer avec les sources orientales du christianisme primitif dont elle estime l’héritage échoir aux maronites, investit ces derniers de cette particulière vocation. Des prometteuses générations de disciples sortiront alors de futurs savants qui deviendront éminents patriarches, ou iront faire fortune à Paris, voire rejoindre les ordres religieux européens – sujet de plainte du patriarcat résidant au Liban.

Les savants maronites

Ainsi, parmi les élèves dont les convois se poursuivent dès la fin du XVIe siècle la République des Lettres s’attire de futurs auteurs brillant aussi bien dans le domaine de la théologie et la philosophie que dans celui des langues ou l’histoire. Je retiens ceux dont j’ai eu l’heureuse occasion de traiter, Abraham Ecchellensis (Ibrahim al-Haqilani), Gabriel Sionite (Gibrail al-Sahyuni) et Jean Hesronite (Yuhanna Hasruni) au XVIIe siècle, Joseph Simon Assémani (Yussef Semaan as-Semaani) au XVIIIe siècle, tous disciples du Collège Maronite de Rome et principaux promoteurs de cette exubérante production que j’appelle volontiers « littérature maronite d’expression latine ». Au XVIIe siècle, Abraham Ecchellensis (1605-1664), interprète des deux langues arabe et syriaque de Louis XIV, est invité par le roi et le cardinal Armand de Richelieu à apporter son concours à la Bible polyglotte, ambitieuse entreprise dont l’objectif est la traduction de la Bible en sept langues. « Il s’acquitta parfaitement de sa fonction »20, operi præfuit munus egregie explevit, dira Carlo Cartari, Préfet des archives du Vatican et biographe d’Ecchellensis. Quoiqu’on voie le savant maronite alterner érudition et vie politique – il rentre en effet au service du prince Fakhreddin al-Maani, qu’il entreprend de familiariser avec la culture toscane –, on ne peut cependant négliger ses contributions dans le domaine des grammaires arabo-latines du XVIIe siècle, destinées à réussir le rapprochement linguistique entre l’Europe latine et l’Orient syro-arabe. Dans ce contexte, le Nomenclator Arabico-Latinus, dictionnaire grammatical qu’Ecchellensis élabore dans une langue arabe classique, s’avère être en dépit de son caractère non exhaustif un outil indispensable pour s’initier à la philologie arabe.

S’illustrent également au XVIIe siècle Gabriel Sionite et Jean Hesronite, qui se présentent comme interprètes du roi Louis XIII. Le tandem entreprend de condenser en latin le Kitab nuzhat al-muchtaq du géographe arabe Al-Idrisi et de lui ajouter un supplément, qu’ils publient en 1619 chez l’éditeur Jérôme Blageart, sous le titre De nonnullis Orientalium urbibus, necnon indigenarum religione ac moribus tractatus brevis. S’agissant d’une rapide prosopographie des villes d’Orient que ponctuent la description des mœurs religieuses et sociales et le portrait des principaux hommes de lettres et sciences, il n’est pas difficile de constater que l’opuscule, écrit dans un latin rudimentaire peut-être en raison de la légèreté de la matière, entend faire découvrir l’Orient à l’Europe chrétienne du XVIIe siècle.

Au XVIIIe siècle, Joseph Simon Assémani21 marque l’histoire de l’Église maronite. Jeanne Bignami Odier le resitue dans une famille de bibliothécaires : « Les Assemani, dit-elle, jouèrent un rôle important à la Bibliothèque Vaticane. Le 10 mars 1710, fut nommé scriptor Orientalis Guiseppe Simonio Assemani qui devait devenir second custode le 30 septembre 1730, puis premier custode le 3 janvier 1739, et mourir à la tâche, à Rome, le 13 janvier 1768 »22.

Personnalité de taille que forgent tour à tour une plume élégante et classique, une vaste érudition et une sérieuse application, Assémani arrache la confiance de Clément XI, qui le choisit pour présider aux travaux du Synode libanais de 1736. L’essentiel cependant c’est son intarissable créativité, dont le summum se résume en trois ouvrages, à savoir les Œuvres de saint Éphrem (Sancti patris nostris Ephræm Syri opera omnia), le Catalogue des manuscrits de la Bibliothèque Apostolique Vaticane (Bibliothecæ Apostolicæ Vaticanæ codicum manuscriptorum catalogus) et La Bibliothèque Orientale Clémentino-Vaticane (Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana). C’est alors La Bibliothèque Orientale qui illustre que « des intellectuels chrétiens orientaux ont assuré consciemment un rôle de passerelle entre l’Occident et le monde arabe et musulman »23. Publiée dans le premier quart du XVIIIe siècle par les soins de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide, republiée en 2002 par Gorgias Press, qui respecte la subdivision de sa matière en trois volumes, la monumentale histoire ecclésiastique d’Assémani, destinée à recueillir la bibliographie des Églises orientales, est en effet une somme d’érudition qui scelle la notoriété de son auteur. Après s’être présenté comme Docteur en théologie et scriptor des langues syriaque et arabe à la Bibliothèque Vaticane, Assémani en vient à présenter le commanditaire de La Bibliothèque Orientale, à savoir le pape Clément XI, et annoncer que son ouvrage est le fruit du recensement et classement d’un grand nombre de manuscrits écrits en langues orientales ou occidentales, en syriaque, arabe, persan, turc, hébraïque, samaritain, arménien, éthiopien, grec, égyptien, espagnol et malabare24. Dans l’importante introduction de son ouvrage, Præfatio totius operis, laquelle inaugure le premier volume consacré aux syro-orthodoxes, Assémani adopte une patiente démarche détaillant respectivement les accroissements que réalise la Bibliothèque Vaticane grâce aux dons des papes, de Clément XI en particulier dont il salue le mécénat ; le récit des voyages en Orient notamment en Égypte, à la recherche des manuscrits ; le rôle des premiers auteurs de bibliothèques, ses prédécesseurs, comme saint Jérôme, auteur du Catalogue qui recense des écrivains syriaques tels qu’Archélaüs et Éphrem ; son hommage aux travaux d’Ecchellensis et Fauste Nairon, son successeur. Ensuite, le scriptor maronite résume les motifs de la création de La Bibliothèque Orientale, en s’attribuant la mission de faciliter, dans l’intérêt public des lettres, la compréhension des langues orientales dans lesquelles les manuscrits ont été écrits, et leur accessibilité aux Européens. Mais c’est d’une façon singulière qu’il défend la vision de Clément XI : « Le très savant pape, dit-il, non seulement voyait que le monument ainsi préparé serait utile pour la connaissance de l’ensemble des sciences, mais il pensait que les archives publiques des peuples orientaux seraient tout à fait nécessaires pour réexaminer les avis sur la religion, les rites et mœurs de ces mêmes nations, dont il est souvent question dans la curie romaine »25. Dans la préface des autres volumes, Assémani reprend, en les creusant, certaines de ces idées. L’éloge prononcé à Clément XI se développe en soulignant l’importance de l’intervention personnelle de l’illustre souverain pontife, défenseur des belles-lettres, dont l’œuvre enrichit la Bibliothèque Apostolique Vaticane d’une quantité considérable de volumes et manuscrits réunis de Grèce, d’Égypte et de Syrie, et traitant de religion, conciles, rites sacrés, histoire religieuse et hérésies. De nouveau le pape, très attentif à la consolidation et propagation de la foi catholique, confie à Assémani la mission d’initier une étude dans laquelle il inventorie sous forme de catalogue le contenu de chaque manuscrit, en décrivant l’époque, les travaux des auteurs, tout comme l’apport de ces derniers à la science26. Un profit certain serait à tirer des avis critiques qu’émettent les érudits examinateurs avant de concéder l’imprimatur. Voici par exemple ce que dit le 13 décembre 1721 Carlo Majelli, custode de la Bibliothèque Vaticane, avant de donner son consentement à la publication du second volume de La Bibliothèque Orientale Clémentino-Vaticane consacré aux monophysites. Reconnaissant que l’ouvrage du savant maronite aide à la découverte scientifique, Majelli revalorise sa contribution à « éloigner les nations d’Orient des erreurs jacobites »27.

Je reviens au Bullarium Maronitarum, œuvre de Toubia Anaissi, moine de la Congrégation Alepino-Libanaise Syro-Maronite et abbé de l’Hospice-Collège à Rome. Cet imposant recueil de deux cent treize bulles patiemment glanées par Anaissi dans les archives du Saint-Siège et dans la Bibliothèque Vaticane, reproduit une partie de l’échange épistolaire effectué entre la papauté et le patriarcat maronite, et reflète l’image d’une tranche décisive de l’histoire maronite allant depuis le concile de Latran au XIIIe siècle jusqu’en 1899, soit deux décennies avant la déclaration de l’État du Grand Liban. Le Bullaire de l’abbé Anaissi ne recèle pas toutes les bulles – la bibliothèque de Bkerké conserve en effet une cinquantaine d’autres bulles, dont certaines sont des doubles de celles de Anaissi. La totalité des pièces prouve que, même pendant la période de silence sous les mamelouks, la correspondance dont la traduction est assurée par le « truchement » des Franciscains installés à Beyrouth s’intensifie entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Certes, illustrant une littérature épistolaire à la langue formulaire, les bulles pontificales privilégient un arsenal de citations et expressions bibliques, vétérotestamentaires de préférence, dont en premier veluti rosæ inter medias spinas28, « comme des roses au milieu des épines », laquelle semble être bien affectionnée par le pape Léon X dans sa bulle Cunctarum Orbis Ecclesiarum envoyée en éloge le 1er août 1515 au patriarche Siméon de Hadath29. Il n’en est pas autrement de decor Carmeli, et gloria Libani30, « la magnificence du Carmel, et la gloire du Liban », qui inaugure la bulle Non exaruit omnino decor Carmeli, et gloria Libani, adressée le 20 août 1625 par le pape Urbain VIII au patriarche Jean Makhlouf31. Obéissant à un emploi stéréotypé qui correspond parfaitement au genre littéraire particulier de la bulle, littérature catholique officielle, les citations bibliques émaillent de leur contenu théologique les formules d’en-tête et de conclusion, ainsi que l’expression du sentiment de fraternité et de la bénédiction apostolique, le tout découlant d’une plume qui se veut paternelle, préservant les chrétiens de l’Est contre le danger.

* * *

Il n’est pas besoin de redéfinir le rattachement catholique des maronites telle une « constante », rappel qui laisserait sous-entendre la mise en place d’une politique ecclésiastique déterminée par un jeu d’intérêts. Car la réalité est bien autre, comme l’a montré cette rapide diachronie du latin en corrélation avec l’Église maronite : celle-ci a vécu un peu plus de la moitié de son histoire dans le giron de la sainte Église romaine, et le présent article ne s’est même pas proposé d’en évaluer les coûts. En effet, si l’incorporation à l’Église mère leur a procuré une forme de sécurité, les maronites cependant ont souvent été accusés de désunion par les Églises orientales locales, voire de collaboration avec l’Occident par les Ottomans. Il faut reconnaître aussi qu’il est difficile de négliger le legs religieux formé au fils des siècles, sans cesse objet de recherches multidisciplinaires. Je pense tout particulièrement, en ces moments surtout où les complications géopolitiques deviennent anxiogènes pour le Liban, aux questions de latinisation et de délatinisation, ainsi qu’au rôle des missions, à la survie de la francophonie et des rapports avec l’Occident, dans l’avenir de la communauté

Mireille Issa
Centre d’Études Latines
Université Saint-Esprit de Kaslik – Liban

  1. Théodoret de Cyr, Histoire des moines de Syrie, ou Histoire Philotée, Paris, éd. Du Cerf, 1979, tome II, p. 28-33. ↩
  2. Gabriel Sionita, Ioannis Hesronita, De nonnullis Orientalium urbibus, necnon indigenarum religione ac moribus tractatus brevis, Paris, Jérôme Blageart, 1619, cap. 6, p. 14. Traduit et annoté par Joseph Moukarzel, Mireille Issa, Le bref traité de quelques villes orientales, de la religion et des mœurs de leurs indigènes, de Gabriel Sionite et Jean Hesronite, à paraître chez Brepols, Miroir de l’Orient Musulman. ↩
  3. Joseph Moukarzel, « Le portrait des maronites », in Le latin des maronites, Paris, Librairie Orientaliste Paul Geuthner, 2017, p. 163. ↩
  4. Cantique 4, 11 : « L’odeur de tes vêtements est comme l’odeur du Liban ». Osée 14, 6 : « Il aura la magnificence de l’olivier, et les parfums du Liban ». Jérémie 18, 14 : « La neige du Liban quitte-t-elle le rocher de la plaine ? Voit-on tarir les eaux qui viennent de loin, fraîches et courantes ? ». ↩
  5. Robert Burchard Constantin Huygens, Willelmus Tyrensis Chronicon, Turnhout, Brepols, Corpus Christianorum, 1986, LXIII, lib. VII, cap. 21, p. 371. ↩
  6. R. B. C. Huygens, Willelmus Tyrensis Chronicon, livre XXII, cap. 9, p. 1018. ↩
  7. Harald Suermann, Histoire des origines de l’Église maronite, Kaslik, PUSEK, 2010, p. 88. ↩
  8. Collectio Avellana : Epistulæ Imperatorum, Pontificum, aliorum inde ab a. 367 usque ad a. 553 datæ, Vienne, édition Otto Günther, CSEL 35/2, 1898. Frédéric ALPI, « Les documents latins de la controverse anti-sévérienne du VIe siècle. Leur importance et leur usage dans la définition de l’identité maronite chez les historiens des XVIIe-XVIIIe siècle », in Le latin des maronites, p. 19-27. ↩
  9. Harald Suermann, Histoire des origines de l’Église maronite, p. 91-95. ↩
  10. Ibid., p. 93. ↩
  11. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum complectens bullas, brevia, epistolas, constitutiones aliaque documenta a Romanis Pontificibus ad Patriarchas Antiochenos Syro-Maronitarum missa, Rome, Max Bretschneider, 1911. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, Paris, Librairie Orientaliste Paul Geuthner, 2019. ↩
  12. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, bulle V Quia divinæ sapientiæ bonitas indeficiens, p. 9-13. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, p. 29-34. ↩
  13. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, bulle XXXIII Benedictus Deus et Pater Domini nostri Jesu Christi, p. 70-72. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite,
    p. 107-111. ↩
  14. Nasser Gemayel, Les échanges culturels entre les maronites et l’Europe. Du Collège Maronite de Rome (1584) au Collège de Ayn Warqa (1789), Beyrouth, 1984, p. 1-18. ↩
  15. Sami Kuri, Missiones Orientales, Monumenta Proximi-Orientis III, Palestine-Liban-Syrie-Mésopotamie (1583-1623), Rome, Institutum Historicum Societatis Jesu, 1994, p. 351. ↩
  16. Jérôme Dandini, Voyage du Mont Liban du R. P. Jérôme Dandini, nonce dans ce pays-là, Paris, Billaine, 1675. ↩
  17. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, p. 81-83. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, p. 121-125. ↩
  18. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, p. 84-89. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, p. 125-132. ↩
  19. Aurélien Girard, « Le Collège Maronite de Rome et les langues au tournant des XVIe et XVIIe siècles. Éducation des chrétiens orientaux, science orientaliste et apologétique classique » in Elisa Andretta, Antonella Romano, Antonietta Viscelglia (éd), Le lingue nella Roma della prima età moderna. Luoghi e risorse, numéro monographique de la Rivista Storica Italiana, Napoli, 1, 2020, p. 272. ↩
  20. Mireille Issa, Joseph Moukarzel, Abraham Ecchellensis Maronita. Biographie faite par Carlo Cartari, édition, traduction et commentaire du manuscrit latin Vita Abraham Ecchellensis de l’Archivio di Stato di Roma, in Tempora, Annales d’Histoire et d’Archéologie, Beyrouth, Université Saint-Joseph de Beyrouth, volume 18, 2007-2009, p. 172. ↩
  21. P. Élias Khalifé, « Joseph Simon Assémani († 1768) écrivain maronite », in Le latin des maronites, p. 147-156. ↩
  22. Jeanne Bignami Odier, José Ruysschaert, La Bibliothèque Vaticane de Sixte IV à Pie XI. Recherches sur l’histoire des collections de manuscrits, Città del Vaticano, Biblioteca Apostolica Vaticana, 1973, p. 160. ↩
  23. Bernard Heyberger, Aurélien Girard,
    « Chrétiens au Proche-Orient. Les nouvelles conditions d’une présence », in Chrétiens au Proche-Orient (introduction), Dossier thématique des Archives des sciences sociales des religions, 171, 2015, p. 26. ↩
  24. Josephus Simonius Assemanus, Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana, in qua manuscriptos Codices Syriacos, Arabicos, Persicos, Turcicos, Hebraicos, Samaritanos, Armenicos, Æthiopicos, Græcos, Ægyptiacos, Ibericos, et Malabaricos, ex jussu et munificentia Clementis XI Pontificis Maximi … recensuit, Rome, imprimerie de la Sacrée Congrégation de Propaganda Fide, 1721. ↩
  25. Josephus Simonius Assemanus, Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana, volume 1, De Syris Orthodoxis, introduction non paginée : « Videbat enim sapientissimus Pontifex, amplissimum Codicum hujusmodi apparatum non modo scientiis omnis generis utile futurum, sed … cogitabat, publica illa populorum Orientalium instrumenta perquam necessaria fore ad librandam judicia, quæ de religione, Ritibus, moribusque earundem Nationum in Romana Curia frequenter aguntur ». ↩
  26. Josephus Simonius Assemanus, Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana, volume 3, Scriptoribus Syris Nestorianis, introduction non paginée : « … mandavitque ut tractatum aggrederer, in quo exacto atque perspicuo catalogo quid unusquisque codex complecteretur, referrem ; Auctorum omnium ætatem, gesta, lucubrationesque describerem, quodque in iis sive ad sacram, sive ad profanam eruditionem magis facere videretur, adnotarem ». ↩
  27. Josephus Simonius Assemanus, Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana, volume 3, de Scriptoribus Syris Monophysitis, Censorum judicia non paginé : « … maximo usui futurum puto, non iis modo, qui res et antiquitates Ecclesiasticas cognoscere et scrutari amant, verum illis etiam, qui ad propagandam Catholicam Religionem, atque ab erroribus revocandas Orientis nationes Jacobitarum hæresi mancipatas, operam profitentur ». ↩
  28. Cantique 2, 2 : « Comme un lis au milieu des épines ». ↩
  29. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, bulle XXII, p. 47. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, p. 77. ↩
  30. Isaïe 35, 2 : « La gloire du Liban lui sera donnée, avec la magnificence du Carmel ». ↩
  31. Tobia Anaissi, Bullarium Maronitarum, bulle LXVII, p. 137. Karam Rizk, Mireille Issa, Bullarium Maronitarum. Bullaire Maronite, p. 192. ↩

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