Le projet éditorial et intellectuel de cet ouvrage s’inscrit dans le parcours de rencontres et d’échanges impulsé par le Réseau d’étude international sur l’âge, la citoyenneté et l’insertion sociéconomique (RÉIACTIS) au sein de la communauté scientifique depuis sa création en 2006.
Le vieillissement de la population est l’une des mutations majeures du siècle dernier, dont les conséquences sont sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Allant au-delà des constats sur le vieillissement démographique, les auteurs dépassent les rhétoriques statistique ou comptable et examinent le sujet à partir de la question des droits, de l’intervention publique et de l’action collective.
Dans une lecture historique de l’évolution de l’État et des politiques publiques – notamment dans les pays développés –, force est de constater que le développement des mécanismes de prise en charge de l’individu par la collectivité tout au long du cycle de vie, et particulièrement aux deux extrémités de l’échelle des âges, pose la question de la structuration d’une réponse politique. Plus encore, ce sont les solidarités collectives qui sont remises en question, à travers les principes fondateurs, les modes d’action et les tensions qui s’exercent sur les modèles développés dans les sociétés industrielles et postindustrielles. Aux solidarités intergénérationnelles basées sur la responsabilité individuelle et les relations intrafamiliales ou communautaires de proximité, se sont substituées ou ajoutées de nouvelles formes de règles structurant les rapports à l’âge et au vieillissement à partir d’un large registre de droits humains, civiques, politiques, sociaux et économiques. Leur intrication et la multiplicité des évolutions dans le temps et dans les différents espaces culturels rendent l’analyse des phénomènes et des tendances particulièrement complexe.
L’ouvrage propose une réflexion structurée en trois parties. Dans la première partie « citoyenneté et politiques de la vieillesse », les auteurs abordent la création et le développement des critères d’âge qui ont permis d’imposer des formes étatiques de contrôle et d’ordonnancement des populations. Depuis la délimitation du temps de l’enfance, sanctuarisée hors des contraintes du travail, promis à l’éducation, jusqu’à l’élaboration des premières retraites, les critères d’âge ont dominé la conduite des politiques publiques. La seconde partie « Pouvoirs politiques et participation sociale des aînés » s’intéresse plus particulièrement aux déclinaisons des pouvoirs politiques et des formes de participation sociale des aînés. Poursuivant une approche interactionniste, l’ouvrage s’interroge sur les protagonistes de la construction de normes collectives censés organiser ces rapports. Même si les rapports de pouvoir entre acteurs sont inégaux, les personnes âgées disposent d’une capacité théorique d’agir sur leur environnement. Enfin, la troisième partie « Intégration, exclusion et vieillissement » ouvre la réflexion sur les processus et dynamiques d’intégration et d’exclusion à l’œuvre dans la compréhension du pouvoir des personnes âgées et de leur environnement.
Grâce à cette multiplicité de regards posés sur le droit de vieillir par plus de quarante chercheurs et experts issus de dix pays, ce livre appelle à maintenir une approche attentive aux cadres multiples structurants de l’action publique, tout en considérant les réalités individuelles et propres à différentes sous-populations.
Sous la direction de Jean-Philippe Viriot Durandal, Emilie Raymond, Thibauld Moulaert, Michèle Charpentier
Presses de l’Université du Québec, 2015
380 p. – 38 €