Pablo Iglesias, fondateur du nouveau parti Podemos en Espagne, sa conception de la politique et de la démocratie, ses propositions pour démocratiser le fonctionnement de l’Union européenne et de la zone euro, et appelle à une plus grande politisation des jeunes.
Le nouveau parti Podemos (“Nous pouvons”), né du mouvement des Indignés, effectue une remarquable percée lors des élections législatives de décembre 2015 en Espagne et talonne en voix les socialistes mais à cause du système électoral n’obtient que 69 députés. En moins de deux ans, Podemos est devenu la troisième force politique nationale. Son fondateur, Pablo Iglesias, 37 ans, enseignant, chercheur en sciences politiques, incarne les aspirations de la jeune génération espagnole. Il présente dans cet ouvrage sa conception de la politique et de la démocratie, ses propositions pour démocratiser le fonctionnement de l’Union européenne et de la zone euro, et appelle à une plus grande politisation des jeunes.
La spécificité de ce mouvement réside dans ce que Iglesias appelle “un coup d’État soft” en référence à ce que disait David Harvey de Wall-Street. Le jeune leader espagnol dénonce vivement ce parti de la finance qui domine directement ou indirectement le monde, s’impose aux gouvernements par le pouvoir de l’argent pour asseoir le système économique néolibéral. Iglesias se lève également contre les agences supranationales (la Troïka, le G8, le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les agences de notation).
Son ouvrage débute avec la promesse de la Révolution française, trahie par le régime de sacralisation de la propriété privée. S’appuyant sur une solide culture politique et historique, Iglesias développe par la suite l’histoire du cheminement de l’idée démocratique en Espagne, un combat vieux de cent ans. Se référant à Ernest Bloch, il soutient qu’ “il y a un excédent d’utopie” dans les luttes du passé qui peut inspirer les luttes actuelles. “C’est sans doute la perspective qu’il convient de donner aujourd’hui aux luttes de la Transition espagnole dans la bataille que nous devons livrer aujourd’hui pour la démocratie” écrit Iglesias.
Ce livre n’est pas un programme politique mais une profonde réflexion qui révèle un riche itinéraire personnel. Iglesias semble adhérer au “Principe Espérance” d’Ernest Bloch qui revient sur le concept d’utopie concrète où les potentialités individuelles aboutissent à l’actualisation, par le progrès de l’Histoire. Ce principe d’espérance, Iglesias a su l’incarner auprès des membres de Podemos, des trentenaires, pleins d’espérance et d’énergie pour promouvoir un changement hors de la politique conventionnelle, une régulation pacifique à la crise loin du chaos. Un livre qui s’adresse aux jeunes Européens déçus de la classe politique et de l’Europe des technocrates, et qui aspirent à un renouveau de la politique dans une Europe plus démocratique. Les récentes élections législatives espagnoles ont consacré l’enracinement du mouvement.
Pablo Iglesias
La démocratie face à Wall Street
Préface de Thomas Piketty – Traduit de l’espagnol par Amandine Py
Les arènes, 2015
280 p. – 18 €