L’approche de la la COP-21, qui se tiendra à Paris en décembre, a suscité une pléthore d’ouvrages sur la question climatique. Parmi cette abondante littérature, le livre de Christian de Perthuis et Raphaël Trotignon, respectivement fondateur et membre de la chaire d’économie du climat à l’université Paris-Dauphine, nous paraît incontournable par sa clarté et ses qualités pédagogiques.
Les auteurs plaident pour une tarification internationale du carbone susceptible de propulser un véritable changement. Reconnaissant les difficultés pour y parvenir, notamment les blocages entre pays occidentaux et pays émergents, ils montrent comment la résolution de la question du climat devrait s’inscrire au cœur des choix économiques et sociaux.
En préambule, les auteurs fournissent les informations de base permettant de mieux comprendre le fonctionnement de la négociation climatique. Ils visent, en leur qualité d’économistes, à mieux cerner les interactions entre le réchauffement de la planète et le fonctionnement de l’économie. Ils appellent au changement des règles du jeu en introduisant une nouvelle valeur dans l’économie internationale : celle qui est accordée collectivement au climat. “Un accord climatique ambitieux doit donc se jauger à sa capacité de modifier les règles du jeu économique, afin de réduire l’écart croissant entre les intentions bien pensantes – rester en dessous du 2°C – et la trajectoire en accélération des émissions mondiales de gaz à effet de serre” écrivent-ils. A partir de ces objectifs bien définis, les auteurs inscrivent leur raisonnement dans la géopolitique contemporaine. La question climatique prend racine dans la mondialisation des économies, un mouvement séculaire qui a permis une vague d’expansion inédite dans l’histoire humaine en redistribuant de la croissance en faveur des pays émergents ; la mondialisation transforme de ce fait la vision binaire pays riches/pays pauvres dans les négociations, en vision tripolaire dans laquelle les pays émergents à revenu intermédiaire occupent une place centrale. Comment faire en sorte que la transition climatique soit alors équitable du fait des écarts entre niveaux de développement ? Les pays n’ont pas les mêmes moyens. C’est du reste l’absence de consensus sur ces règles d’équité qui a contribué à l’enlisement de la négociation dans le cadre onusien. Le contexte redeviendra-t-il plus favorable à Paris ? Les auteurs avancent un ensemble d’arguments, une somme de connaissances pour contrer le climato-scepticisme. Ils proposent, pour sortir des blocages, de revenir aux principes fondamentaux et de centrer la négociation autour de trois axes : les engagements des gouvernements sur les émissions, un système crédible de mesure et vérifications, des instruments économiques adaptés. Ils examinent par la suite comment ces trois axes doivent s’articuler pour que la conférence de Paris introduise une véritable rupture dans la vie internationale. Il faut donc replacer la question de la tarification du CO2 émis au cœur des négociations. Parmi les propositions concrètes suggérées à cet effet : une taxe carbone payée par les Etats dont les émissions par tête dépassent la moyenne mondiale, la mise en place d’un marché transcontinental du carbone, en commençant par l’Union européenne, puis les Etats-Unis et la Chine. Les annexes présentent les dates clés de la négociation climatique et un tableau des vingt principaux émetteurs de CO2 énergétique dans le monde en 1990 et en 2012.
L’ouvrage de Christian de Perthuis et Raphaël Trotignon contribue par sa clarté et la pertinence de l’analyse à une meilleure connaissance des enjeux de la coopération internationale face aux dérèglements climatiques. Il fournit des éléments de base permettant au lecteur de se positionner en toute connaissance de cause dans un débat public souvent pollué par des partis pris idéologiques et biaisé par le jeu des lobbies.
Christian de Perthuis et Raphaël Trotignon
Le climat à quel prix ? – La négociation climatique
Odile Jacob, 2015
146 p. – 19,90 €