Pour terminer l’année, retrouvez la sélection de la Revue Politique et Parlementaire, entre histoire, art et philosophie, à découvrir chez Gallimard et aux Editions du Cerf.
Le lion de France, Flavien Dupuis, Editions du Cerf
Présentation de l’éditeur
Que sait-on aujourd’hui de Louis VIII, roi de France pendant seulement trois ans, qui manqua de devenir à la fois roi de France, d’Angleterre et de Castille ? Louis le fils de Philippe Auguste, attendant patiemment dans l’ombre de son père que vienne son heure. Louis le Lion, qui étendit le pouvoir royal jusqu’à La Rochelle et rattacha le Languedoc à la couronne. Louis le guerrier, à la reconquête du Poitou, triomphant du roi d’Angleterre à la Roche-aux-Moines, sans qui la fameuse victoire de Bouvines n’aurait pas été possible… Louis le Capétien, revenu de l’ivresse de la conquête, qui reprit à son compte la politique patiente de ses ancêtres et poursuivit l’expansion du domaine royal à l’intérieur des frontières du royaume. Mais aussi Louis l’époux de Blanche de Castille, qui assura ensuite la Régence jusqu’à l’avènement de son fils, le célèbre Saint Louis.
Le témoignage d’un destin téméraire : celui d’un souverain à la fois sage et brave, foudroyé au zénith de son règne. Un roi lettré, cultivé, injustement tombé dans l’oubli, protecteur des arts et des lettres, à rebours des clichés médiévaux. Un récit enlevé et un travail précieux, qui vient éclairer un pan jusque-là méconnu de notre récit national.
Capitale, Jonathan Siksou, Editions du Cerf
Présentation de l’éditeur
Rues et statues, défilés et bals, décrets et émeutes, crues et incendies, saints et assassins : c’est la France qui, à travers Paris, comme en un kaléidoscope, se diffracte, se déroule et se donne tout en sourires et en larmes dans son éternel quotidien. Qu’est-ce une ville, sinon un livre tissé de livres s’ouvrant devant qui désire déchiffrer les époques, les lieux, les êtres qui l’ont façonnée ? Qu’est-ce voir vivre et mourir une ville, la concevoir siècle après siècle à se construire et à se détruire jusqu’à ne plus savoir ce qu’elle est ? Qu’est-ce le souvenir d’une ville s’il ne fait pas mémoire ? La mémoire d’une ville, si elle ne fait pas histoire ? L’histoire d’une ville si elle ne se fait pas récit ? Qu’est-ce revoir le temps qui passe et qui efface inexorablement la pierre, l’événement, le visage qui ne subsistent plus alors que dans l’écrit ?
C’est en écrivain au grand style, précis et libre, ascétique et inspiré, que Jonathan Siksou se fait l’ultime promeneur de Paris, entraînant à sa suite les chroniqueurs qui l’ont précédé et qui ont tout raconté, tout chanté, tout filmé de la ville-lumière. Sauf comment, dans la Capitale, notre passé devient notre présent au point de réduire l’avenir à une nostalgie. Une démonstration littéraire à hauteur de la plus fascinante des villes du monde. Une métaphysique de l’urbanité. Un roman. Le nôtre.
Un Occident kidnappé, Milan Kundera, Gallimard
Présentation de l’éditeur
Aussitôt paru dans Le Débat, en novembre 1983, cet article, traduit dans toutes les langues européennes, a sonné comme un plaidoyer et une accusation. Plaidoyer pour la défense de l’Europe centrale (Hongrie, Pologne, Tchécoslovaquie), qui par sa tradition culturelle appartient tout entière et depuis toujours à l’Occident, mais que celui-ci ne voit plus qu’à travers son régime politique, ce qui n’en fait qu’une partie du bloc de l’Est. Une culture qui n’est pas l’apanage d’une élite, mais la valeur vivante autour de laquelle se regroupe le peuple. Une accusation, car la tragédie de ce foyer des « petites nations », qui se savent périssables, est en fait celle de l’Europe elle-même qui ne veut pas le voir et ne s’est même pas aperçue de leur disparition. N’est-ce pas là un des signes de sa propre disparition ?
La valeur du texte ne vient pas seulement de son habileté démonstrative, mais de la voix si personnelle, véhémente, angoissée de l’auteur, Milan Kundera, qui apparaît alors comme un des plus grands écrivains européens. Le voilà remis à la disposition du lecteur d’aujourd’hui, présenté par Pierre Nora, et précédé d’un texte inconnu du public français, le discours du jeune Kundera au Congrès des écrivains tchécoslovaques de 1967, en plein Printemps de Prague, présenté par Jacques Rupnik.
Pablo Picasso, Écrits. 1935-1959, Collection « Quarto », Gallimard
Présentation de l’éditeur
Comme il l’avait confié à Jaime Sabartés en 1939, Pablo Picasso avait rêvé d’un livre qui « serait le reflet le plus exact de sa personnalité et son portrait le plus fidèle. On y verrait exprimé le désordre qui lui est propre. Chaque page serait un vrai “pot-pourri” sans la moindre trace d’arrangement ou de composition. […] Simplicité et complexité s’allieraient comme dans ses tableaux, ses dessins ou ses textes, comme dans une pièce de son appartement ou de son atelier, comme en lui-même ».
Dans le prolongement de ce désir, la présente édition donne à lire l’ensemble des écrits de Picasso publiés en 1989, auxquels s’adjoignent un grand nombre d’inédits découverts dans l’ancienne collection de Dora Maar, dans des collections privées et celles des musées Picasso (Paris, Barcelone). Composés au crayon noir, en couleurs, à l’encre de Chine, au stylo-bille ou encore au crayon-feutre, ces textes ornent papier à dessin, à lettres, dos d’enveloppe, cartons d’invitation, morceaux de papier journal… Certains sont même gravés, enluminés, lithographiés ou peints, ainsi élevés au rang d’œuvre d’art.
La fascination que continue d’exercer Picasso sur le public rend plus que jamais nécessaire la lecture de ces écrits, souvent méconnus et pourtant indispensables à l’appréhension et à la compréhension de son œuvre. Cette édition bénéficie des derniers apports de la recherche en cours dans un volume en couleurs, richement illustré d’œuvres et de manuscrits, et, à la manière d’un parcours muséal, elle permet de s’immerger au cœur du processus créatif de l’un des plus grands artistes du XXe siècle.
Proust et la société, Jean-Yves Tadié, Collection « Blanche », Gallimard
Présentation de l’éditeur
Chaque siècle a besoin d’une Comédie humaine. Celle du XXe nous a été donnée par Marcel Proust. Sa vie a coïncidé avec la meilleure époque de la IIIe République et avec les sources du monde contemporain. Il a observé le remplacement d’une société de cour par une société des élites, et la permanence d’un peuple chargé d’histoire.
C’est le regard de Proust sur ce monde extérieur changeant que nous avons voulu analyser. Si le monde intérieur de l’auteur, avec sa sensibilité et ses passions, nous est bien connu, s’épanouissent également dans son œuvre une sociologie, une géographie et une histoire, chacune de ces disciplines se proposant de rendre compte du monde tel qu’il a été, tel qu’il est. En creux se dessine alors un portrait renouvelé d’un auteur tout à fait dans son siècle.
Quelle surprise de voir Proust, parfois injustement décrit comme un peintre du passé, si sensible à certains aspects de la vie collective moderne ! Observateur avisé de ses contemporains, il intervient volontiers dans les débats de l’époque (génocide arménien, affaire Dreyfus, séparation de l’Église et de l’État), tout autant qu’il fait preuve d’un grand intérêt pour les progrès techniques nombreux (téléphone, aviation). Homme social évoquant ses fréquentations, boursicoteur peu capable de gérer sa fortune, géographe de Paris et de la province, Proust se dévoile de façon inédite, parfois malgré lui.
Voici donc un parcours à travers un autre monde, et à la découverte d’un autre Proust.
Éthique, John Dewey, James Hayden Tufts, Collection « Bibliothèque de philosophie », Gallimard
Présentation de l’éditeur
Que pourrait être une éthique démocratique ? Telle est l’interrogation qui donne son relief à la réflexion développée dans cette Éthique de John Dewey et James Hayden Tufts. L’édition de 1932 traduite ici conserve la clarté pédagogique d’un ouvrage conçu, dans sa version originelle de 1908, comme un manuel universitaire, mais elle est enrichie par la prise en compte des questions sociales et politiques surgies au cours des années terribles qui séparent les deux textes, de la Première Guerre mondiale à la crise de 1929. De l’échec des tentatives de moralisation des relations internationales aux défis d’une société livrée aux forces du marché et en proie à l’individualisme, l’actualité des thèmes imposés, de la sorte, par les événements reste la nôtre sous de nouveaux visages. La contribution de Tufts explore la façon dont chaque société sécrète son dispositif éthique. Dewey rappelle les traits des grandes philosophies morales avant de proposer leur dépassement, qui va de pair avec le dépassement du dualisme entre individu et société.
La démocratie, fait-il valoir, a besoin d’une éthique en mesure de répondre aux revendications d’autonomie d’acteurs confrontés à des forces économiques et politiques aveugles. Une nécessité qui se trouve plus que jamais au cœur de l’espace public.
Situations, Jean-Paul Sartre, Tome VII, Collection « Blanche », Gallimard
Présentation de l’éditeur
De mai 1958 à octobre 1964, Sartre est sur tous les fronts. Depuis le premier volume de Situations, on le sait curieux et perspicace ami des écrivains et des artistes : Albert Camus, Paul Nizan, André Masson, Merleau-Ponty, Andreï Tarkovsky… Le refus du prix Nobel de littérature et la tonalité polémique que Sartre lui donne viennent mettre le point final à ces pages consacrées aux lettres et aux arts. Ce qui, incontestablement, tient la première place, c’est le combat politique. La toile de fond en est le conflit algérien et, de manière plus générale, les conflits du Tiers Monde ; y apparaissent de grotesques figures, d’autres que Sartre juge plus pernicieuses et dangereuses pour la démocratie et la République, d’autres enfin qui sont à ses yeux porteuses d’espérance ou véritablement héroïques. Dans ce combat politique, Sartre fait flèche de tout bois : le polémiste y excelle, le moraliste y cisèle ses aphorismes ; la violence va jusqu’au cri, semble emporter l’écrivain au-delà de toute retenue.
Mais il est enfin un autre Sartre plus humain, plus fraternel, celui qui part à la recherche de ses amis disparus, qui sont morts prématurément, absurdement, et à qui il faut rendre hommage ou justice : Camus, Nizan et Merleau-Ponty. Ces trois éloges funèbres sont également trois occasions de revenir sur soi, de comparer sa propre vie et celle de ceux qui ont disparu, de voir tout le chemin parcouru, tantôt avec eux tantôt sans eux ou contre eux, de jeter sur qui l’on fut un regard qui n’a nulle complaisance mais qui n’est pas sans tendresse.
Bonne lecture avec les Editions du Cerf et Gallimard