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dans Economie

Suffit-il d’augmenter les salaires pour accroitre la richesse des pays ?

ParClaude Sicard
12 juin 2023
Suffit-il d’augmenter les salaires pour accroitre la richesse des pays ?

Telle est la question à poser aux spécialistes des comptabilités nationales. Nous allons voir que ces systèmes d‘analyse de l’économie des pays sont fondés sur les salaires, et ceux-ci sont très variables d’un pays à l’autre. A l’intérieur de la zone monétaire européenne leur montant varie de 1 à 5.

Ce n’est qu’après la dernière guerre mondiale qu’ont été mis en place, dans les pays, ces systèmes d’analyse de la politique économique des Etats que l’on nomme les  « comptabilités nationales ». Ce sont des outils très précieux et l’on ne cesse de s’y référer. Elles résultent, nous disent les experts, des travaux de John Maynard Keynes qui s’était rendu célèbre avec son ouvrage « Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt, et de la monnaie », paru en 1936 ; et il y eut, ensuite, l’apport de Leontief avec ses tableaux « entrées sorties », puis celui de Timbergen, aux Pays Bas. Finalement, ce n’est qu’à partir de 1945 que les différents pays à travers le monde se sont dotés chacun d’une « comptabilité nationale », une normalisation des méthodes ayant été faite par l’ONU, en 1970, avec « Le document méthodologique du système de comptabilité nationale » (SCN).

Les comptabilités nationales permettent  de mesurer dans chaque pays la « richesse » qui y est produite, ce que l’on nomme le Produit intérieur brut (PIB), et de suivre comment elle évolue, chaque année. Les  PIB sont constitués par les valeurs ajoutées des différents acteurs de la vie économique, les services publics étant valorisés par ce que leur production coûte à la nation.

Chaque pays est donc caractérisé par son PIB, et l’on se base sur cette donnée constamment. Par exemple, le traité de Maastricht a prévu, en 1992, que le déficit budgétaire des pays membres doit obligatoirement être inférieur à 3 % du PIB, et leur endettement extérieur ne pas franchir la barre des 60 % du PIB. On doit donc s’interroger : cet instrument est-il parfait ? Et que signifie le terme de « richesse » lorsque l’on s’en réfère aux PIB/capita des pays pour les comparer les uns avec les autres ?

Les salaires, clé de voute des comptabilités nationales

Comme le montre le tableau ci-dessous, les PIB/capita que nous donnent les comptabilités nationales sont le reflet tout à fait exact des salaires existant dans les pays :

                                      PIB/capita      Salaire mensuel moyen

                                          (US $)                    (US $)

                  Zambie           1.137                       100

                  Nicaragua      2.045                      158

                  Côte d’Ivoire 2.549                       190

                  Paraguay       5.891                       459

                  Gabon           8636                        597

                  Russie          12.194                       937

                  Chili             16.265                     1.249

                  Grèce          20.192                     1.640

                  Arabie         23.185                     1.903

                  France         43.659                    3.524

                  Israël           52.170                     3.638

                  Danemark   68.007                     5.333

                  USA             70.248                     5.492

                  Suisse          91.991                     7.329

Du fait du rôle déterminant que jouent les salaires dans les comptabilités nationales des pays, on peut se poser un certain nombre de questions.

Quelques anomalies qui posent question :

  • Les PIB per capita des pays : un bon indicateur de richesse ?

Les économistes  considèrent que les PIB per capita sont de bons indicateurs de la richesse des pays, et ils y recourent constamment.

La France avec un  PIB/capita de 43.659 dollars se situe en Europe en 13e position seulement, placée dans ce classement au dessus de l’Italie, et légèrement en dessous du Royaume Uni. Et la Suisse se trouve tout à fait en haut dans ce classement, avec un niveau de richesse double du notre.

En pratique, lorsque l’on se déplace en Europe d’un pays à l’autre on a peine à percevoir qu’il existe de tels écarts entre les pays.

En suspectant donc que les PIB/tête ne reflètent pas parfaitement la réalité, les organismes internationaux effectuent des évaluations en termes de PPA, ce terme signifiant  « parité de pouvoir d’achat », et l’on voit alors les différences se restreindre.

Nous donnons ci-dessous les PIB/capita tels qu’ils résultent des comptabilités nationales, et les PIB/capita calculés en PPA :

.                                         PIB  et PIB  en PPA (US$)

                                          PIB               PIB en PPA    PIB/PPA

 

                   Espagne    30.103                40.602       0,74

                  Italie          35.657                46.385       0,76

                  France       43.659                51.009       0,85

                  GB             46.510                50.860       0,91

                  Allemagne 51.203               58.290       0,87

                  Suède        61.023                59.237       1,03

                  Norvège    89.154                80.555       1,10

                  Suisse        91.991                77.140       1,20

                                                                       ( Source : BIRD 2021)

On voit que les écarts entre ces valeurs peuvent aller de 20%  à 25 %. Dans une comparaison avec le Royaume Uni,  le PIB/tête  de ce pays est très sensiblement supérieur au notre, mais en termes de pouvoir d’achat c’est l’inverse, et nous sommes légèrement au dessus ; dans

la comparaison avec la Suisse, nous sommes en termes de PIB/capita du simple au double, mais en termes de PPA nous nous trouvons a 66 % du niveau de notre voisin.

Autre surprise en matière de PIB/capita, le classement de la Chine dans la catégorie des pays sous-développés. Les pays de l’OCDE se sont engagés en 1969 devant les Nations-Unies à consacrer chaque année 0,7 % de leur PIB, ou plus exactement de leur RNB  (Revenu National Brut cad le PIB plus les revenus venant  de l’extérieur) aux pays en voie de développement : c’est ce que l’on nomme l’Aide  Publique au Développement (APD). Et il faut alors choisir un critère pour définir ce qu’est un pays sous-développé. Le CAD (Comité d’Aide au Développement) de l’OCDE a mis  la barre à 12.000 US$. Ainsi la Chine se trouve –t- elle encore dans cette catégorie et  la France a dû lui verser  la somme de 140 millions d’euros en 2020 au titre de l’APD. Le PIB/capita de la Chine est relativement faible  en raison du nombre fabuleux d’habitants que possède ce pays : on sait qu’elle maitrise aujourd’hui toutes les technologies et qu’elle participe  avec les américains à la conquête de l’espace.

  • La productivité des actifs

Lorsque l’on examine les comptabilités nationales des pays on note avec surprise que la productivité des actifs est très variable, d’un pays à l’autre, en entendant par là ce que produit chaque actif, (division du PIB par le nombre des actifs).

Ce sont, en effet, les actifs qui, par leur travail, produisent de la richesse.

On a les chiffres suivants :

                           PIB             Nombre d’ actifs         PIB/actif

                    (milliards US$)        (Milliers)                 (US $)

         Pologne       679                  18.211                37.285

         Grèce          214                    4.619                 46.330

         Espagne     1.427                 23.381               61.032

         Italie           2.107                  25.001               84.242

         France        2.957                 31.132                94.982

         Roy. Uni      3.131                   34.637               90.395

        Allemagne    4.259                43.967               96.868

         Pays Bas     1.012                  9.902                 102.200

         Suède           635                   5.555               114.301

        Israël              488                  4.186                116.579

         Danemark     398                   3.050                130.49

         Etats Unis    23.315               164.796             141.478

         Suisse             800                    4.963              161.192

                                                              (Source : BIRD, année 2021 )

Ce tableau est surprenant : d’où vient qu’un Polonais, par exemple, ne produise, lorsqu’il travaille, que 37.285 dollars par an,  alors que dans le même temps un actif français est crédité par la comptabilité nationale de son pays  d’une production de 94.982 dollars, et un Suisse de 161.192 dollars ?  Ces résultats sont stupéfiants : pourquoi un travailleur suisse est il capable de produire dans une année quatre fois plus de richesses qu’un Polonais ? Est-ce un problème de niveau d’instruction ? Ou bien de recours beaucoup plus intense à des capitaux, les emplois suisses étant fondés sur des intensités capitalistiques bien supérieures à celles des Polonais ? Le problème est posé.

Ce que l’on constate, c’est que, très logiquement, les salaires dépendent de la valeur de ce que les personnes  produisent : on a ainsi la corrélation  suivante ;

                           Production par  actif  Salaire  moyen mensuel

                                        (US $)                       (US $)

                  Pologne     37.285                         1.279

                  Grèce        46.330                         1 .640

                  Espagne    61.032                         2.527

                  Japon        72.011                          3.465

                  France       94.982                        3.524

                  Allemagne 96.868                        4.045

                  Israël           116.579                      3 638

                  Danemark  130.491                      5.333

                  Etats Unis   141.478                     5.492

                  Suisse          161.192                     7.329

(Salaires :source JDN)

  Comme on le voit, la corrélation entre ces données est bonne. La France est placée parfaitement sur la droite de corrélation : l’équation  indique que le salaire moyen français devrait se situer à 3.690 dollars, soit un écart infime avec le salaire constaté (4,7 %).

Mais l’on peut aussi se demander si ce ne sont pas, à l’inverse, les salaires qui  déterminent dans les comptabilités nationales, l’importance des productions ? Sur le graphique précédent nous avions pris pour variable explicative la production par actif, et, à l’inverse,  nous prendrons, ici, les salaires comme variable explicative, et l’on a alors la corrélation suivante :

 Le coefficient de corrélation est meilleur que dans le cas précédent. On doit donc s’interroger sur le rôle des salaires, et plus généralement des revenus du travail, dans la formation des PIB.

On voit, avec cette corrélation, que  le niveau des salaires  pourrait bien déterminer la valeur de ce qui est produit.

Nous prendrons un cas concret dans l’industrie automobile : un véhicule fabriqué en Roumanie de marque Dacia va avoir une valeur faible du fait que les salaires sont très bas dans ce pays :  et le même véhicule fabriqué en France va, en comptabilité nationale, ressortir avec une valeur beaucoup plus grande du fait que les salaires en France sont beaucoup plus élevés qu’en Roumanie: or, c’est exactement le même véhicule, et sur le marché international l‘un et l’autre vont se vendre au même prix, : ils ont fondamentalement la même valeur marchande, mais ils ne contribuent pas à accroitre la richesse de leur pays de la même façon.

De même dans les activités tertiaires : un bus Mercedes qui transporte des passagers à  Bucarest et le même bus, à Paris, ne contribuent  pas pour le service qu’ils rendent  à la collectivité à la même augmentation du PIB de leur pays, du fait que le salaire du  chauffeur roumain est très inférieur à celui du chauffeur parisien ; pourtant le service rendu est le même : un chauffeur roumain ne conduit pas plus mal qu’un chauffeur parisien. On souhaiterait pour  comparer la richesse des pays que l’on prenne partout les mêmes valeurs pour les salaires.

On en vient donc à s’interroger sur l’influence des salaires dans la formation des PIB des pays : les biais introduits par les différences de salaires sont considérables.

La part des revenus du travail dans les PIB :

Nous avons calculé la place revenant aux revenus du travail dans les comptabilités nationales des pays en partant du nombre des actifs et des salaires moyens. Et nous avons classé les pays en fonction de leur niveau de développement économique. On a le tableau suivant :

         Niveau de développement        Part du travail ( en % du PIB )

 

         Faible :

                   Mexique                                        71,6 %

                  Hongrie                                          71,2 %

         Moyen : 

                  Espagne                                       63,8%

                  Portugal                                       60,4%

                  OCDE                                          59,8%

                  Allemagne                                   56,5%

                  France                                         55,7%

                  GB                                                54,0%

         Elevé

                  Finlande                                       46,4%

                  Suisse                                           42,8%

                  Suède                                           42,4%

                                    (Source : calculs à partir des données BIRD)

 

Plus les pays sont développés,  plus il y a d’investissements à rémunérer, et la part des cash-flows (amortissements et profits) augmente : celle du travail s’en trouve alors diminuée.

D’où le passage de 72% à 42,0% que nous voyons sur le tableau ci-dessus, selon le degré de développement économique des pays.

Pour les pays se situant dans la catégorie « moyenne » ( moyenne OCDE) comme c’est le cas de la France, la rémunération du travail intervient dans les PIB pour environ  60 %. C’est dire l’importance de cet agrégat : dans le cas de la France, par exemple, une augmentation des salaires de 10 % accroit notre PIB de 5,57 % !. Faut-il  vraiment appeler cela de la « croissance » ?

Comment se déterminent les salaires ? 

On voit qu’il faut procéder à une réflexion sur la façon dont se fixent les salaires puisque la rémunération du travail est le point clé de la réflexion à mener sur les PIB.

Nous prendrons le cas d’Israël, un Etat dont la création est toute récente (1948), où l’on peut donc aisément  voir pourquoi et comment les salaires, avec le développement du pays, ont été amenés à aller en augmentant. Cela a commencé, comme partout ailleurs,  par l’agriculture, car, en premier, il s’agit de nourrir la population. Les Israéliens ont inventé les « kibboutz », un mode d’organisation collective permettant de produire efficacement des végétaux, notamment sous serres, un système bien adapté à un pays qui dispose de très peu de terres arables. Et Israël créa aussitôt des centres de recherche agronomiques pour faire de la sélection végétale et développer de nouvelles techniques de production (le goutte à goutte par exemple).

Avec ce système d’organisation, de type collectif, les salaires étaient très bas ce qui était acceptable, les besoins étant limités : avec des gens vivant en collectivité les coûts de nourriture, de logement, d’éducation des enfants, etc….sont faibles et les produits agricoles, du fait de salaires très bas, sont produits à des coûts  très limités..

Il y eut ensuite, avec l’arrivée de capitaux extérieurs importants et la venue de nombreux ingénieurs et techniciens bien formés, (et ce mouvement de migration avait d’ailleurs déjà débuté dans les années 1930 avec la migration de nombreux ingénieurs allemands fuyant le régime nazi) le développement d’un secteur industriel : outils agricoles, meubles, chaussures, équipements medicaux…. Puis, à partir de 1960,  il y eut le développement d’une industrie de l’armement. On vit alors les  exportations se développer : il y avait eu déjà, d’ailleurs, dans la phase première, un  développement des exportations agricoles ( les oranges de Jaffa, notamment). En 2007 il y avait 413.000 personnes travaillant dans le secteur industriel. Avec le développement du secteur industriel, et les gains de devises réalisés à l’exportation, les salaires augmentèrent beaucoup, d’année en année. La valeur moyenne des biens produits augmenta régulièrement et les salaires purent progresser. En 2010, le niveau de développement atteint par ce petit Etat lui permit d’entrer dans l’OCDE. En parallèle, il se développa évidemment un secteur tertiaire. On vit donc, dans ce pays, les salaires augmenter progressivement avec l’accroissement régulier de la valeur de ce qui était produit par l’industrie, et il y eut un effet de diffusion naturelle dans les deux autres secteurs de l’économie, le secteur agricole et celui des services. Les Israéliens se mirent à fabriquer des biens  de plus en plus sophistiqués, maitrisant de mieux en mieux toutes les technologies. Dans l’Etat d’Israël, un expert local nous  dit : « Notre ressource naturelle, c’est notre cerveau et nos connaissances que nous utilisons pour faire de la haute technologie ».

On voit donc que c’est bien l’industrie, un secteur d’activité où le progrès technique croit rapidement, qui explique que les salaires ont pu s’élever : Jean Fourastié, d’ailleurs, on s’en souvient, avait dans  « Le grand espoir du XXè siècle », fait de la vitesse à laquelle croit le progrès technique le critère retenu pour distinguer les secteurs de la  vie économique :

         Secteur primaire : l’Agriculture……….  progrès technique faible

         Secteur secondaire : l’Industrie……….  progrès technique élevé

         Secteur tertiaire : les Services……………progrès technique nul

Aujourd’hui,  l’Etat d’Israël produit des biens de haute valeur ajoutée et le PIB/capita des Israéliens est supérieur au notre. On qualifie Israël de «  start-up nation » : les industries sont de très haute technologie et de très nombreux centres de Recherche-Développement étrangers sont venus s’y installer. Israël mise énormément sur la Recherche, et son budget de R&D est parmi les plus élevés du monde en proportion du PIB : 4,1 %, en 2021,  bien supérieur à la moyenne OCDE qui est  seulement à 2,26 %.

On voit donc  que c’est par la valeur croissante des biens manufacturés qu’ont augmenté les salaires en Israël, et c’est ce même phénomène qui se produit dans tous les pays.

Un pays où, globalement, les biens manufacturés en moyenne ne sont pas de grande valeur va avoir des salaires peu élevés : par contre, dans un pays où, globalement, les biens produits sont de haute valeur technologique, donc chers, les salaires seront élevés.

Le juge de paix est le marché. : c’est lui qui en est juge. Très logiquement, dans les pays où les salaires sont très élevés,  fabriquer des produits peu sophistiqués conduit les entreprises à des marges négatives du fait que le coût du travail est trop élevé, et le pays abandonnera ce type de fabrication laissant cette activité a des pays techniquement moins avancés.

En somme les salaires sont le reflet du niveau moyen des technologies dans un pays.

Le problème du niveau technologique des biens produits par un pays est donc fondamental : un pays développé doit veiller à avoir une main d’œuvre extrêmement bien formée techniquement et des centres de recherche très pointus.

Lorsque l’on parle de la « richesse » des pays telle qu’elle est exprimée par les PIB, on s’en réfère à leur niveau technologique : les PIB sont fondés sur les salaires et leur niveau dépend de la sophistication technologique moyenne des pays. Si la Suisse a un PIB/tète bien supérieur au notre c’est parce que son industrie produit, en moyenne, des biens plus sophistiqués que nous : produits pharmaceutiques de haute valeur qui ont nécessité beaucoup de dépenses en recherche, mécanique de précision, horlogerie de luxe, etc… Et l’on doit insister sur le fait qu’il s’agit de moyennes.

Pour ce qui est de la question posée par le titre de notre article la réponse est simple. Comment va se traduire une augmentation brutale de 10 % des salaires ?  La comptabilité nationale du pays reflétera la réalité des faits. Les firmes ayant pu encaisser cette augmentation importante des salaires vont voir leur production augmenter pour autant qu’elles auront pu conserver tout leur personnel et augmenter en proportion leurs prix. Celles, par contre, qui n’auront pas été capables d’avaler cet accroissement soudain de leur masse salariale auront capoté. Dans  un cas les valeurs ajoutées seront majorées ; dans l’autre on perdra des valeurs ajoutées : au total on aura un solde, soit positif, soit négatif, et le PIB du pays se trouvera soit augmenté, soit diminué de ce montant.

Le cas de la France

Dans le cas de la France, les salaires sont élevés car le pays est un vieux pays développé, auteur de très nombreuses avancées dans le domaine scientifique et technique : les Français ont été des innovateurs dans beaucoup de domaines : automobile, aviation, chemins de fer, construction navale……. Et, maintenant, dans le domaine spatial, et il y existe donc un excellent niveau technologique. Les salaires sont donc à un niveau élevé, et le coût du travail est le plus haut d’Europe :

                                                     Coût du travail

                                                           (En euros/heure)

                                   France                    37,3

                                   Allemagne             35,9

                                   Hongrie                  10,7

                                   Pologne                  10,4

                                   Roumanie                7,3

(Insee-Dares, Ed 2020)

Les industries à faible niveau technologique sont donc toutes parties.

Le problème est que le nombre des entreprises relevant de hautes technologies qui les ont remplacées est beaucoup trop faible, à la différence de l’ Allemagne.

Notre tissu industriel est à présent tout à fait insuffisant pour générer les rentrées fiscales (impôts et taxes) dont l’Etat a besoin pour couvrir toutes ses dépenses, et il se trouve contraint de recourir, chaque année, à la dette.

Aussi notre pays a-t-il une dette qui n’a pas cessé de croitre, régulièrement, et il ne peut pas en être autrement.

Il faudrait que la France reconstitue donc son secteur industriel, et vu le niveau des salaires cela ne pourra se faire qu’avec  des industries de haut niveau technologique. Il nous faut donc davantage d’ingénieurs, davantage de personnels techniques issus des écoles professionnelles, une administration qui coopère activement avec les entreprises, et d’une façon générale une population ayant un très bon niveau de formation. Et pour ce qui est du recours aux travailleurs issus de l’immigration, ce sont des personnels très bien formés dont nous avons besoin, et pas d’illettrés.

L’Etat, sous la poussée des Français qui, comme nous l’avait dit en son temps François de Closet sont insatiables et en veulent « toujours plus » a pris de l’avance en matière de dépenses publiques : ce sont celles de pays qui ont des PIB per capita 50 % plus élevés que le notre.

Il est illusoire de penser que l’ Etat pourra être en mesure de les réduire, car les Français y sont habitués, notamment dans le domaine social.

Il faut simplement que les personnels des services publics veuillent bien travailler davantage, et plus efficacement, donc s’attaquer au problème des 35 heures, à celui du taux beaucoup trop élevé d’agents bénéficiant indument du statut privilégié de « fonctionnaire» (une garantie d’emploi à vie), et à celui des jours d’absence anormalement importants dans les administrations publiques, chaque année. Et il faut réindustrialiser le pays à un rythme accéléré, ce qui est loin d’être le cas. Cela nécessite que les pouvoirs publics aient l’autorisation de subventionner les créations d’emploi dans ce secteur, ce que la Commission européenne, à Bruxelles, leur interdit de faire car elle est obnubilée par des rêves libéraux irréalistes. Ces aides à l’investissement sont d’autant plus nécessaires qu’il va falloir attirer massivement les investissements étrangers car les entreprises françaises ne seront pas en mesure de soutenir le rythme d’investissement nécessaire à une réindustrialisation s’effectuant à un rythme accéléré.

Il est à craindre que notre réindustrialisation ne puisse s’effectuer au rythme voulu, compte tenu de tous les freins à l’investissement industriel qui existent dans notre pays, et, alors, notre dette extérieure ne va pas cesser de grossir. L’agence de notation Fitch a bien vu le problème en rétrogradant d’un cran la note de la France, comme elle l’a fait récemment ; sans doute l’Agence Standard and Poor’s  qui vient de s’exprimer a –t- elle été de son coté trop indulgente en ne bougeant pas la position de la France dans sa dernière notation. Bruno Le Maire avait reçu à Bercy les experts de cette agence avant qu’ils ne s’expriment : il a du charme, et il est très convaincant, et sans doute la question de la réindustrialisation de notre pays n’a-t-elle pas été abordée, car ce genre de préoccupation   n’entre pas dans les schémas d’analyse des grandes agences financières : l’industrie n’est pas dans leur culture.

Claude Sicard
Économiste
Consultant international

 

 

Claude Sicard

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