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dans N°1100, Politique

La « violence », son instrumentalisation politico-médiatique et sa problématisation sociologique

ParLaurent Mucchielli
28 octobre 2021
La « violence », son instrumentalisation politico-médiatique et sa problématisation sociologique

Le 28 juillet 2021, le quotidien Le Figaro titrait : « Hausse spectaculaire des violences en France », prétendant révéler le « bilan analytique de la délinquance pour les six premiers mois de l’année ». La réalité serait catastrophique : « un tableau saisissant, où l’on découvre que le degré de violence dépasse déjà, en ce milieu d’année, le niveau atteint durant la séquence pourtant agitée des gilets jaunes au premier semestre 2019 ». En effet, « les homicides et agressions dépassent, de janvier à juin, le niveau d’avant la crise sanitaire sur la même période, alors que le climat de tension sociale s’est encore accru dans le pays ».

Quelques jours plus tard (5 août), le service statistique du ministère de l’Intérieur publiait son bulletin mensuel1. Le contraste entre les données et explications qui y sont produites et le propos du journaliste pose question. Dans ce rapport, on ne trouve quasiment rien qui permette de justifier une telle exubérance, pour ne pas dire désinformation. Interstat publie par exemple ce graphique sur l’évolution mensuelle des homicides depuis 2014, où l’on constate que ce nombre oscille en réalité entre 50 et 100 depuis des années (les pics de 2015 et 2016 correspondant aux attentats de Paris et Nice).

On lit aussi dans ce bulletin mensuel que les vols avec violence (avec ou sans arme) ne cessent de diminuer.

En réalité, seules deux courbes augmentent en tendance : celle des coups et blessures volontaires non mortels et celle des violences sexuelles.

Or les chercheurs montrent depuis de longues années que l’augmentation des plaintes pour violences physiques ou sexuelles, qui entraîne cette augmentation des « faits constatés » par la police et la gendarmerie, traduit avant tout une plus forte propension des victimes à dénoncer des faits jadis davantage tolérés. Ceci se constate dans la durée mais aussi dans l’instant : à chaque scandale éclatant dans le débat public (par exemple les mouvements #metoo #balancetonporc), il s’en suit une hausse des plaintes pour violences sexuelles. C’est pour cette raison que, dans la recherche, nous avons développé depuis très longtemps des enquêtes en population générale (dites enquête sur la victimation et le sentiment d’insécurité) qui fournissent une autre série temporelle, résultat direct des déclarations des éventuelles victimes sans filtre institutionnel (que les personnes aient ou non porté plainte). Et le résultat de ces sérialisations2

indique que les problèmes sont globalement stables et non en « hausse spectaculaire ».

L’évolution trimestrielle des homicides en France de 2014 à 2021

Source : ministère de l’Intérieur, Interstats

Pourquoi « la violence » n’est pas une bonne catégorie d’analyse

La société française contemporaine est saturée par l’usage du mot « violence ». Des faits divers criminels abondamment relayés par les médias aux incendies de véhicules de la nuit du nouvel an, en passant par toutes les formes d’insultes et de harcèlements, aucun territoire, aucun métier, aucune scène de la vie sociale, publique ou privée, ne semble y échapper. Ce mot sert aussi massivement à qualifier toutes les formes de conflits civils et militaires dans le monde. En pratique, « la violence » s’écrit au singulier et elle n’a pas de contenu précis prédéterminé. C’est qu’il ne s’agit pas d’une catégorie d’analyse. Plus qu’une qualification de faits, il s’agit en réalité d’une disqualification de faits. La violence est quelque chose que l’on condamne. C’est de surcroît quelque chose dont on s’inquiète : c’est « l’augmentation de la violence » qui fait parler. C’est donc un signe des temps : l’idée d’une violence envahissante semble faire partie d’une représentation décadentiste du présent.

À distance de ces représentations sociales et de ces catégories normatives, le travail du chercheur consiste d’abord à définir un ensemble de phénomènes sociaux relativement homogène à étudier, ensuite à tenter de comprendre les mécanismes qui régissent l’évolution de ces phénomènes. On s’intéressera à l’ensemble des violences interpersonnelles, physiques, sexuelles et verbales, survenant dans les relations interpersonnelles. Ceci exclut les violences de type terroriste, les violences d’État ou encore les violences politiques collectives telles que les émeutes. Et l’explication proposée depuis une dizaine d’années3 réside dans un modèle sociohistorique articulant cinq processus.

Pacification des mœurs et transformation du statut des comportements violents

La célèbre thèse du sociologue allemand Norbert Elias sur le « processus de civilisation » – parlons plutôt de « pacification », mot moins normatif – n’est pas obsolète. Contrairement aux annonces médiatiques régulières, les violences interpersonnelles ne connaissent pas d’ « explosion » ces dernières décennies. Il est probable au contraire qu’un processus de pacification des mœurs participe du recul continu de l’usage de la violence interpersonnelle comme issue aux conflits ordinaires et quotidiens de la vie sociale. Ce processus a en effet pour conséquence première de délégitimer le caractère violent des comportements. D’où un paradoxe qui n’est qu’apparent : le sentiment général d’une augmentation des comportements violents peut parfaitement accompagner un mouvement d’accélération de leur dénonciation mais aussi de stagnation voire même de recul de leur fréquence réelle.

En réalité, notre société ne supporte plus la violence, ne lui accorde plus de légitimité, ne lui reconnaît plus de sens.

Du coup, les comportements changent de statut. Ce qui était regardé jadis comme normal ou tolérable devient anormal et intolérable. Ceci concerne l’ensemble des violences sexuelles, les violences conjugales, les maltraitances à enfants, les bagarres entre collégiens, les agressions physiques ou verbales à caractère raciste ou homophobe, les pratiques violentes de bizutage, etc.

Criminalisation et disciplinarisation étatiques

Dans les années 1990, confrontés aux conséquences du chômage de masse et du redéploiement des inégalités, à un haut niveau des vols et cambriolages et à une demande de sécurité croissante, la plupart des États occidentaux ont fortement réinvesti leurs prérogatives régaliennes et tenté d’imposer un niveau supérieur de contrôle pénal. Le processus de criminalisation en est la clef. Le législateur ne cesse de créer de nouvelles infractions ainsi que de durcir la poursuite et la répression d’incriminations préexistantes. On assiste en particulier au renforcement continu de la pénalisation des violences sexuelles, des violences visant certaines catégories de personnes (les conjoints, les mineurs, les fonctionnaires), certains lieux (notamment les établissements scolaires) ou certaines circonstances (les manifestations, le fait d’agir « en réunion »).

Les vingt premières années du 21e siècle ont été le théâtre d’une véritable « frénésie sécuritaire »4.

Jamais autant de comportements n’ont été interdits et sanctionnés, avec parfois de vrais impacts sur la vie sociale (ainsi le changement de braquet en matière de contrôle et de sanction des comportements sur la route) et parfois aucun (ainsi la prohibition continue de l’usage et du commerce des drogues, qui n’a nullement entamé leur réalité).

Judiciarisation des conflits  de la vie sociale

La judiciarisation consiste dans le fait de recourir à la justice pour régler des litiges, conflits, différends en tous genres. Ce processus est favorisé par les deux précédents mais il est lié également à l’évolution des modes de vie en tant qu’ils réduisent les capacités de régulation des conflits inter-
individuels. Les modes de vie périurbains séparent toujours plus le lieu d’habitat familial du lieu de travail, des commerces où l’on fait ses courses et parfois des équipements scolaires, des loisirs et des lieux de l’engagement associatif. Nos lieux d’habitation sont par conséquent toujours plus anonymes. Ne pas connaître ses voisins est courant, l’anonymat est la règle dans les transports en commun et dans les lieux de « sorties ». De manière générale, les contacts de proximité s’amenuisent à vitesse accélérée. Dès lors s’accentue encore un mouvement ancien de réduction des capacités de règlement infra-judiciaire des conflits inter-individuels. Faute d’interconnaissance, de dialogue et de médiation, les individus se retrouvent seuls entre eux pour réguler leurs conflits et n’ont d’autre solution, s’ils ne parviennent pas à s’entendre, que de saisir la puissance publique.

Compétition pour les biens de consommation

La plupart des actes de délinquance dénoncés par les victimes dans les enquêtes sont des atteintes aux biens : avant tout des vols, des cambriolages et des escroqueries sur Internet. Comme l’avait annoncé le sociologue américain Robert Merton, le développement constant de la société de consommation s’accompagne d’une délinquance d’appropriation qui constitue une sorte de redistribution violente, dans une société où l’anonymat facilite grandement la tâche des voleurs.

Ainsi, le principal risque dans la société française contemporaine est de se faire voler des biens (ou de l’argent permettant d’acquérir des biens) dans son commerce, chez soi, dans l’espace public ou sur Internet.

Et de se faire violenter si d’aventure on tente de résister au vol. De toutes les « violences », le vol avec violence n’est généralement pas la plus grave mais c’est devenu la plus fréquente.

Ségrégation socio-spatiale

Après avoir analysé des processus qui traversent toute la société française, il faut s’interroger sur les différences relatives entre types de territoire et groupes sociaux y résidant. Non seulement les modes de vie des « hypercentres » diffèrent de ceux des zones rurales « profondes » et des zones périurbaines en pleine croissance, mais au sein même des « banlieues » des moyennes et grandes villes, la polarisation sociale ne cesse de croître. En région parisienne, au terme des enquêtes de victimation, il apparaît que les problèmes se concentrent dans « des communes de néo-prolétariat précaire à forte dimension immigrée localisées dans une proche banlieue nord-est », comme l’écrivaient très récemment les spécialistes de ces questions5

. Alliée au développement continu de la société de consommation, cette ségrégation constitue le principal facteur contredisant le processus général de pacification des mœurs. C’est donc à la question de la répartition des richesses déterminant les conditions de vie que renvoie aussi in fine l’analyse de l’évolution des violences interpersonnelles.

Laurent Mucchielli
Directeur de recherche au CNRS (Centre Méditerranéen de Sociologie,
de Science politique et d’Histoire,
UMR 7064, CNRS et Aix-Marseille Université)

  1. https://www.interieur.gouv.fr/Interstats/Actualites/Interstats-Conjoncture-N-71-Aout-2021 ↩
  2. Voir par exemple : https://theconversation.com/linsecurite-un-epouvantail-electoral-a-deminer-132362 ↩
  3. Laurent Mucchielli, L’invention de la violence, Fayard, 2011. ↩
  4. Laurent Mucchielli (dir.), La frénésie sécuritaire, La Découverte, 2008. ↩
  5. Antoine Jardin, Edmond Préteceille, Philippe Robert et Renée Zauberman, « Territoires et insécurité en Île-de-France », Déviance et Société, 2021, n° 2, p. 319-355. ↩
Laurent Mucchielli

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