De Donald Trump à Vladimir Poutine en passant par Matteo Salvini, les tenants du Brexit ou les dirigeants eurosceptiques de Pologne et de Hongrie, l’Union européenne compte aujourd’hui tellement d’ennemis qu’on se demande de plus en plus si elle pourra survivre. Et si, au contraire, ces menaces étaient des opportunités s’interroge Guillaume Duval dans son livre Trump, Poutine, Orban, Salvini, le Brexit… Une chance pour l’Europe !
Les difficultés économiques, les incertitudes de l’avenir, la demande croissante de protection, la montée revendiquée des mouvements radicaux nourrissent un scepticisme et amplifient le découragement à pouvoir changer positivement l’Europe, la faire détacher de la logique d’une Europe-marché dominée par la concurrence de tous contre tous. Pourtant la période n’a jamais été aussi favorable pour donner des raisons suffisantes d’espérer une Europe plus intégrée, plus écologique et plus solidaire. Le livre de Guillaume Duval voudrait nous en convaincre. L’idée est de nous sortir de l’apparent paradoxe du titre pour nous faire voir « la bouteille à moitié pleine ».
Contrairement aux idées reçues, Donald Trump est le meilleur allié de l’Europe.
En effet, son attitude vindicative vis-à-vis de l’Union européenne devrait poser de sérieux problèmes aux Européens habitués à s’appuyer sur les États-Unis dans de nombreux domaines, notamment en matière de défense. En fait, cette position agressive les inciterait à relancer le projet européen, et l’isolationnisme croissant américain les obligerait à s’autonomiser. La défense n’est cependant pas le seul dossier sur lequel l’isolationnisme de Trump peut faire accomplir un saut qualitatif à l’intégration européenne ; c’est également le cas du numérique ; le fait que les Gafam ont pris l’habitude de tirer profit des failles juridiques des systèmes fiscaux européens, ouvre le débat d’une autonomie numérique ; et permet aussi la relance de l’économie au sein des pays membres.
De même, la menace russe avec Vladimir Poutine obligerait l’Europe à moins dépendre du gaz russe et à précipiter sa transition écologique.
Quant à l’Europe centrale et orientale elles ne constituent pas une menace pour l’Union européenne car la crainte de la Russie est toujours vive et le parapluie américain est de moins en moins protecteur. Ces peuples sont donc très attachés à l’Europe malgré les signes négatifs.
Le paradoxe suivant, le Brexit, reste une chance pour en « finir avec l’Europe-marché » et pour approfondir la construction européenne.
La crise italienne aussi, peut faire avancer l’Europe, notamment pour réaliser enfin une gestion plus intégrée des migrations.
Concernant le blocage de l’Allemagne sur les orientations budgétaires et la politique du marché du travail, qui maintient une pression déflationniste sur l’économie européenne, il serait impératif de sortir rapidement de la logique ordolibérale d’une gestion de l’Europe par les règles de la zone euro. « Il ne fait aucun doute que l’intransigeance allemande est aujourd’hui un des obstacles les plus sérieux à la relance de l’intégration européenne. Toutefois, à de nombreux égards, la conjoncture est plus favorable qu’il n’y parait à la levée de ces blocages parce que cette Allemagne est plus faible et plus dépendante de la poursuite du projet européen qu’on ne le pense, à condition, bien sûr, de faire l’effort de comprendre les ressorts de la pensée de nos voisins et de bien nous y prendre » écrit Guillaume Duval.
Enfin pour terminer son exploration, l’auteur critique la stratégie d’Emmanuel Macron qui s’est trompé, selon lui, de diagnostic pour relancer la dynamique européenne. Pourtant, en dépit des occasions manquées, la situation demeure fondamentalement favorable à des initiatives françaises audacieuses pour promouvoir l’intégration européenne dans un sens plus social, plus écologique et plus solidaire.
Guillaume Duval développe clairement ses arguments et redonne aux eurosceptiques des raisons objectives d’ espérer une construction européenne plus dynamique et plus efficace.
Trump, Poutine, Orban, Salvini, Le Brexit…
Une chance pour l’Europe !
Guillaume Duval
Les Petits Matins, 2019
144 p. – 14 €