Le propos est libre. Partant d’une quête historique, j’interroge l’actualité en franchissant parfois des espaces/temps conséquents, comme un individu perdu dans la condensation du XXIe siècle, soucieux de temps long : bousculé et en recherche de sens. Car la question se pose : à force de dynamiques mondiales, d’exigences allant d’efficiences en mutualisations1, allons nous perdre l’objet communal ? Au milieu de tant de ronds-points offrant des sens si divers2, que reste-t-il de la continuité communale, de ses ouragans et de ses délices démocratiques ?
Prenant la métaphore giratoire au sérieux, circulons dans les méandres mémoriels suscités par ce terme : « commune ». Dans les titres du Code général des collectivités territoriales (CGCT), peu de mentions de la ville ou de l’urbain, mais pour désigner la collectivité territoriale de proximité, reste inscrit ce terme : « commune ». Dans la Constitution, sont évoquées de façon sibylline les intercommunalités, comme « groupements de communes »… L’attachement immémorial à cette dernière, ainsi gravée dans le marbre des codes, invite à revenir sur la génétique politique du terme, pour mieux en saisir le trouble identitaire actuel, et ce sur quoi il pourrait ouvrir : la régénération d’un vivre ensemble de proximité.
Nous procédons en trois points, que nous essayons de cercler sans tourner en rond : Que retenir des origines bourgeoises de la commune ? Comment qualifier la crise actuelle de l’ordre communal ? La redécouverte des « communaux » dessine-t-elle un regain démocratique de proximité ?
Aux origines de la commune, une certaine bourgeoisie
La commune : voici un terme bien usuel, qui fait rarement objet de définition. De lectures historiques, transparaissent son ancienneté et sa dimension structurante de notre réalité territoriale. « Génétiquement », la commune du XIe siècle, avec ou sans charte, renvoie à une association de jurats scellant un pacte traduisant une concorde locale3. Il s’agit de formaliser une entraide entre « voisins », une solidarité regroupant agriculteurs, commerçants et artisans4. Les premiers bourgeois cumulent ainsi ces activités et sont acteurs d’une propriété collective : les « communaux »5. Ils se regroupent notamment pour défendre leurs intérêts face au seigneur local, ou face à l’abbaye. L’éveil communal est corrélé à l’extension progressive de l’espace des échanges, les commerçants devenant sédentaires et les artisans sortant du servage… Commence la longue histoire du proto-capitalisme, l’économie n’étant pas encore définissable par le rapport à la propriété privée et par l’accumulation ; ainsi, via les communaux, « la propriété est… un droit d’accéder à un bien détenu en commun »6.
La constitution en commune n’est pas déterminée par l’essor économique. Elle a surtout un sens politique.
D’abord, lors de leur installation, les habitants prêtent serment et pour les plus « notables », revendiquent le titre juridique de bourgeois. Ensuite, la reconnaissance de membre de la commune a un ancrage bâti : il faut s’engager à y résider durablement et à y payer des charges diverses. La sanction d’un crime ou d’un délit peut se traduire par la destruction de la maison et aller jusqu’au bannissement. L’autorité communale a une portée spatiale et architecturale, à partir du beffroi et de la cloche – utilisés en cas de crise pour rassembler la population – ; elle est fondue dans la matière via les clés, qui sont données au maire. La fondation de la commune repose aussi sur le choix d’un sceau et la constitution d’une mémoire – coffre d’archives. Ils sont autant de symboles, qui dessinent une autonomie à la fois politique et administrative7.
La commune suppose ensuite, de façon optionnelle dans les premiers temps, la concession d’une charte par le roi ou un seigneur. Cette dernière sanctionne les coutumes préexistantes et concède progressivement moyennant subsides : une fiscalité, un droit, une justice8 et une police propres – mettant, comme pour la « ville franche », à l’abri de l’arbitraire du prévôt, de l’Église ou du seigneur. La commune leur reverse une contrepartie. La différence entre charte communale et charte de « franchise » ne se joue pas sur le degré de libertés concédées, ou la mise en place d’institutions particulières9, mais sur la revendication d’unions d’entraides, qui seules caractérisent la commune. Ainsi, même saisie par le droit royal, elle relève d’une « conjuration », soit d’une communauté de jurés. Elle permet aux bourgeois de se différencier politiquement et de lutter contre les brigues. Ils se lient donc en communia, d’abord pour promouvoir la paix civile, et pour réprimer les ferments de violence – d’où l’importance des prérogatives judiciaires du maire10. Est retrouvé le sens sacré du terme conjuration : elle entend éloigner un danger par le serment qui lie.
Le roi va transformer progressivement la signification de cette vocation à la sûreté : il fait de l’octroi des chartes – dès le XIIe et XIIIe –, un moyen de mettre la bourgeoisie à contribution de la défense du royaume. L’impôt prélevé par Louis IX sur les villes finance les affrontements armés. Plus tard, pendant la guerre de Cent ans, nombre de communes sont reconnues le long du lime qui sépare royaumes franc et anglais, car elles contribuent à l’ost, à l’instar du domaine féodal. L’inflation des chartes est constatée, aussi bien du côté franc qu’anglais. Au milieu du XIIIe, le droit public fige cependant la commune. La période inaugure leur normalisation et leur limitation de leur souveraineté. Certaines disparaissent même. Au sein de la Curia regis, à partir de Louis IX, les légistes utilisent ainsi le droit romain pour homogénéiser les coutumes communales. Les chartes sont complétées pour obliger assez systématiquement à la désignation d’un maire doté de prérogatives – il remplace le prévôt. Se dotant d’une municipalité, soit d’un conseil d’élus choisis par les jurés, la commune est dotée d’une proto-administration. Rétrospectivement, le modèle des établissements de Rouen datant du XIIe siècle, limitant fortement l’autonomie, se généralisera peu à peu durant la monarchie : le maire sera désigné par le roi où la « candidature officielle » prévaudra, choisie parmi une liste fournie par les échevins et le conseil… L’autonomie faiblira : la commune sera « détentrice de privilèges [chèrement acquis] au lieu d’être le témoignage vivant d’une énergique solidarité bourgeoise » ; l’appellation est subsumée par celle de « bonne ville », réunie parmi d’autres dans les états du roi11.
Il faut dire que la concorde intérieure est brisée ; les lignages bourgeois entrent en conflit pour défendre âprement des intérêts divergents. Le développement des corps de métiers12 fragmente l’union de la bourgeoisie ; chaque corporation obtient une représentation à l’échevinage et de proche en proche, obtenant des privilèges particuliers, tend à se singulariser. Cette course à la distinction et l’anoblissement ont des conséquences financières : à plusieurs reprises au fil des siècles, la corruption13 et le goût du faste de ces factions plongent de nombreuses communes et villes franches dans l’endettement. Qui plus est, la Haute bourgeoisie s’exempte du paiement des aides et de la taille, aiguisant la jalousie des corporations. Divisée, la ploutocratie urbaine faillit aussi dans le maintien de la paix civile : plusieurs communes sont secouées par la révolte « des petits contre les gros »14. Le désordre se répand régulièrement : comme à Amiens au milieu du XIVe siècle, ou à Bordeaux – confrérie de l’Ormée fin XVIIe – … Le roi est alors appelé en arbitre : parfois pour veiller aux intérêts des plus faibles ; d’autres fois, comme Louis XI au XVe siècle, ou Henri IV au XVIIe, le roi réprime les rebellions des petits et achète le soutien des grands bourgeois… Quoiqu’il en soit, le monarque intervient de plus en plus dans la gestion de la cité au détriment des libertés communales15. L’une des solutions est d’appeler un bourgeois allogène à la fonction de maire ; il peut arbitrer de façon plus neutre les conflits locaux. Par ailleurs, dans les » bonnes villes », émerge une spécialisation des fonctions administratives, qui s’intercalent entre les notables et nobles ; elle constitue une classe de robba longa faite d’avocats, de procureurs, de gentilshommes « de plume et d’encre »16, sur laquelle peut s’appuyer le monarque, afin de faire main basse sur l’esprit communal.
Enfin, l’État aura raison de l’autonomie locale par dédoublement puis substitution des fonctions municipales, via la création d’offices royaux17 plus attractifs pour la caste privilégiée – au détriment des titres communaux (échevins), qui perdent en intérêt. Les garnisons investissent les cités au XVIIe. Les « corps de ville » sont donc progressivement dilués au sein d’une multitude de « corps et collèges », dont la plupart sont sous contrôle de la monarchie – une domination que la vénalité des charges accroît après 1692, tout comme la dérive ploutocratique de l’administration urbaine…
Bien qu’entrée tôt en crise, nous comprenons combien remonte à loin l’identité communale et qu’elle constitue une base de la stabilité territoriale18. En deux siècles et demi, la France passe de 44 000 paroisses à 35 000 communes. La Révolution jacobine parie sur un tel émiettement pour garantir la primauté du centre. Initialement, la dénomination de commune y obtient un succès incertain, disparaissant même un temps des dictionnaires officiels. Elle est trop apparentée aux corps intermédiaires alors pourchassés : place aux « municipalités » ! En décembre 1789, la commune est définie géométriquement comme subdivision administrative du département dans un rapport des états généraux ; puis, elle renvoie en 1791 à un regroupement autonome d’habitants, via la reconnaissance des conseils municipaux. Promptes à s’émanciper, ces petites Républiques sont ramenées à la raison centralisatrice dès 179319, 2013/2, n° 20, pp. 35-48.]. Parce qu’ayant mâté la Commune de Paris en 187120, la IIIe République peut stabiliser durablement la solution impériale et faire de la mairie, le pilier de l’unité nationale. Ainsi, la loi de 1884 homogénéise le statut, au-delà du nombre et de la diversité des communes : collectivité décentralisée, chacune dispose d’un organe délibérant, d’un organe exécutif dont le chef, le maire, est également chargé d’une mission déconcentrée. Sa « double casquette » en fait l’autorité médiatrice, unissant l’ordre local au national. La jonction se fait cependant au bénéfice du centre, car la tutelle préfectorale est maintenue. Dès lors, la période révolutionnaire accouche plus d’une mairie que d’une commune, même si la IIIe République apporte deux éléments décentralisateurs : l’élection de l’exécutif par le conseil d’une part ; la reconnaissance de la clause générale de compétence – autrement dit de la notion d’intérêt communal – d’autre part.
L’identité communale en crise(s)
Alors finalement : E pluribus communia unum ; en effet, comment l’ordre républicain eût pu véritablement passer outre la commune ? Dans la longue durée, elle rassemble par le critère de résidence des individus recensés par l’état civil ; ils se veulent libres, essentiellement en vertu d’une représentation bourgeoise du monde. L’identité de terroir qui s’y forge lentement, a pour fondation une culture faite de droits évolutifs de propriété et de libre commerce. Ainsi, le périmètre communal identifie des sédentaires, par foyers, qui veulent prospérer en paix – rien de bien menaçant pour un État voulant d’abord contrôler la population sur un territoire. La commune est aussi le lieu où se forge progressivement le patriotisme, en tant que sentiment d’appartenance procédant à la fois d’un intérêt local et national ; à partir du XIXe siècle, il sera le produit de « la communale » – école ayant marqué tant de parcours individuels21. Cette instruction s’ancre dans un terroir, prélude à toutes les « guerres » – à commencer par celle des boutons22 – ; et relie à la grande patrie, à force de manuels républicains ayant façonné une mémoire collective, au risque de quelques raccourcis historiques et de répressions symboliques23.
La compétence éducative locale perdure, mais de nos jours, « la communale » est-elle encore capable de forger un sentiment de reconnaissance collective24? Le manque de moyens ici, les difficultés de la mixité sociale là25, entament le contrat social – pour reprendre un terme cher à Rousseau, laudateur des petites citées26. Néanmoins, le rassemblement au principe de la commune se fait encore lorsque de besoin : les voisins peuvent démontrer une solidarité, dans le malheur ou le bonheur. Actuellement, ils sont incités à se retrouver pour être « vigilants », face aux ferments de délinquances plus ou moins graves. Ils s’abritent les uns les autres en cas de catastrophe et de pénurie… De façon plus heureuse, marchés, fête des voisins, fête des conscrits dans l’Est, et partout, hommages aux morts pour la patrie, manifestations sociales, bals des pompiers, du 14 juillet et du 15 août,… sont autant d’occasions de conforter le vivre ensemble sur la place publique qui continue à rassembler, y compris dans les grandes villes. Une enquête récente indique un « attachement » à la commune – plus fort d’ailleurs, lorsqu’elles regroupent moins de 500 habitants27. L’échelon de proximité par excellence suscite aussi une participation électorale forte, même si en baisse.
Pour autant, 29 % seulement des sondés indiquent rencontrer souvent les services municipaux et 24 %, les élus ou le maire28…
Ainsi, le sentiment d’appartenance est plus lâche, le lien aux lieux et à leurs mémoires perdant en signification pour les dernières générations : « le sens de la fête » semble se diluer dans le silence de l’espace-temps, la condensation du tourisme transnational ici, la consommation assourdissante là, la mutation des cultures de l’instant partout, et pour finir, la semi-privatisation de la place publique, lorsque de besoin… Le consumérisme hédoniste de masse, organisé par une haute bourgeoisie d’affaires transnationales, tend à réduire le commerce communal et l’artisanat indépendant aux acquêts29 – là où l’industrie les avait maintenus. Tenant la longue mémoire de la ville, animant son cœur, les lointains héritiers des bourgeois des premiers temps sont donc affaiblis par l’urbanisme commercial contemporain, fait de lotissements et de zones de services30. Pavillons et résidences sont reliés aux hypermarchés par des ronds-points no man’s land, qui ont surgi paradoxalement en 2019, comme des sites de fraternisation des « gilets jaunes ». Les lieux de cette société du vide et de l’ordinaire, ont alors été les centres pleins de gravité, révélateurs d’une crise culturelle et sociale du lien. Car, corolaire de l’effondrement de certains centres-bourgs ayant besoin du soutien pis-aller de l’État pour survivre31, la composition de l’urbain sous la forme de cercles concentriques renforce l’onde de choc du départ vers la périphérie des classes moyennes – l’éloignement au-delà de la première couronne, étant inversement proportionnel aux revenus. Les populations allant vers le périurbain32 pour garder un confort de vie n’évoluent plus dans la même géographie, le même rapport au temps, les mêmes configurations de consommation33…
Par ailleurs, la commune et sa première couronne sont à nouveau clivées, comme aux temps industrieux des « classes laborieuses, classes dangereuses »34 : cette fois-ci, ce sont les intérêts des détenteurs de patrimoines élevés qui sont aux antipodes de ceux des sans-emplois, ou employés précarisés des services35. Contrairement aux ouvriers et à leur culture urbaine du XIXe siècle36, les hères contemporains ne forgent pas une symbolique communale et ne font pas classe. La dérive financière et spéculative de l’immobilier creuse des inégalités37 dirimantes de toute fraternité : il y a ces grands ensembles abîmés et ces zones aléatoires occupées par les migrants,… Les espaces d’hébergement d’urgence et les « aires recevant les gens du voyage » sont insuffisants à abriter les SDF. Bien lacunaire est devenu ce sens bourgeois détourné de la propriété, qui produit un mal-logement chronique38 et une anomie sociale aigüe dans les villes traversées par les flux peu maîtrisables. Que vaut encore la propriété pour ces ménages modestes, endettés et peu solvables, pouvant inopinément se retrouver à la rue ? Enfin, les intérêts des propriétaires moyens sont-ils compatibles avec des centres-villes ouverts devant générer une rentabilité immédiate – à force, par exemple, de ventes à la découpe ? La quête de la rente foncière et la propriété individuelle ne sont plus régulées par l’intégration communale.
De culture bourgeoise, était aussi l’impérieuse nécessité d’un ordre public fait de propreté, de tranquillité, traditionnellement indissociables de la définition d’un vivre ensemble communal. Haussmann a ainsi poussé loin la logique de la salubrité et de la lutte contre les nuisances, en reconfigurant l’urbanisme parisien au nom de la sûreté. Un siècle plus tard, l’irruption massive de la voiture dans ses rues, comme dans nombre de cités, pousse la commune hors les murs. Au milieu de tant de vitesses, comment exercer sereinement la police de la circulation et du stationnement – chap. 3, sect. 1 du CGCT ? Paradoxalement, la loi qualifie de « durables » les mobilités, au moment où leur diversité met à mal la circulation pacifiée des piétons, cyclistes, automobilistes, et utilisateurs d’engins de déplacement personnel39. Pour les municipalités, accepter ou proposer l’augmentation des moyens de mobilité douce trouve des limites, tant les réseaux sont saturés. L’auto-partage et l’inter-modalité connectés progressent, mais ne suffiront pas40. Les congestions urbaines ont aussi des effets négatifs sur la santé et l’écologie.
Alors, revoir l’urbanisme pour limiter la distance et le temps entre domicile et travail est impératif41 ; mais le bloc communal a-t-il vraiment les possibilités politiques de produire une ville-archipel plus fluide, parce que moins concentrique ? Nous pouvons en douter pour les raisons immobilières mentionnées plus haut, et aussi, car les maires résistent aux dynamiques intégrées de planification : ils veulent rester maîtres de « leurs » espaces42…
Or, l’élu municipal « isolé » a du mal à concilier toutes les contraintes.
À marcher du pas lent du promeneur au cœur des rues pavées, nous sommes donc ramenés à la racine du pouvoir de police administrative générale du maire et à ses insuffisances43. Paris, ville d’incivilités ? Paris, ville de mobilisations incontrôlables ? Paris, ville salle ?… Remplaçons dans ce jeu de poupées gigognes Paris par communes, de tailles et d’aires géographiques variées : depuis une quinzaine d’années, catastrophes climatiques et violences multiples scandent l’actualité, indiquant les difficultés du maintien de l’ordre public urbain.
La commune peut donc redevenir un lieu d’expression de discordes graves et profondes : elle est la première caisse de résonance de tensions fracturant le pacte républicain. Interrogations sur le modèle laïque, avec la diversification des menus dans les cantines, les demandes d’horaires spécifiques dans les piscines ou d’autorisation de construction de nouveaux lieux de culte, etc. ; manifestations violentes, inondations destructrices, installations contestées de dispositifs de « ville intelligente », qui sont autant de moyens de surveillance promettant un monde à la Orwell, etc. Que fait le maire ? Parce que recueillant 71 % de confiance44, il suscite beaucoup d’espoir et, éventuellement, sa contrepartie : une forte déception… jusqu’à subir la virulence incontrôlée de certains. Lors des désordres actuels, il est donc enclin à mettre en scène une aptitude traditionnelle à la rassurance et à l’empathie45. Il est là avec les premiers secours, là auprès des victimes, là pour avoir ces gestes et ces mots qui accompagnent, là pour interpeler les pouvoirs publics centraux. Il peut aussi être le médiateur privilégié d’un débat, voulu national et requis dans l’urgence, pour renouer le dialogue entre le politique trop vertical et le « peuple »…
Car face aux incertitudes cruciales du temps, que peut vraiment le maire, sinon manifester sa solidarité communale ? En termes de responsabilités, il se sent souvent dépassé et délaissé, sinon injustement mis en cause. Un tel état des lieux peut d’ailleurs conduire les édiles à exprimer un « blues » et certains sortants, à ne pas vouloir se représenter46.
Des « communaux » à une démocratie locale plus directe ?
Nous comprenons dans tous les cas pourquoi la commune est aussi, dans le débat passionné – révolutionnaire ou actuel –, le lieu privilégié de rassemblement des concitoyens afin d’échanger des points de vue, d’exprimer des doléances et des colères pour essayer de les dépasser. La Commune de Paris – 1871 – résonne encore dans la mémoire collective, comme projet blessé de démocratie participative et populaire47. Le régime représentatif s’est alors construit sur la répression dans le sang d’une mobilisation égalitariste et directe ; la mémoire de ce crime rend depuis incompréhensible à certains, l’articulation entre l’institution et la participation continue.
Or au titre de la régulation, si la proximité a un sens, elle est d’abord celle d’une démocratie des médiations entre dimension « gentilice » lignagère et réticulaire et dimension stato-nationale, de raison géométrique constituée. L’arbre à palabres au centre de la place ne vaut pas qu’en Afrique, et symbolise l’arbre de vie traditionnel, rassemblant et unissant inégalement les anciens et plus jeunes. L’arbre a pu rythmer de ses nervures, les conversations plus ou moins pacifiques des habitants et les nouer en cercles concentriques. En Méditerranée, traditionnellement, l’organisation gentilice ne procède pas d’une séparation entre public et privé ; elle est peu institutionnalisée. Le lignage et les segments en sont les modes de structuration. Dans une telle société, une forme de démocratie est postulée48, défiant le modèle représentatif : elle serait véhiculée par l’assemblée des anciens, capable de définir le bannissement et les peines. Son fonctionnement serait conditionné à sa petite taille et à un habitus si incorporé, qu’il requiert peu de procédures et de délibérations formelles. Parfois idéalisé, un tel modèle « rousseauiste » et « bourdieusien » constitue parfois le cadre symbolique d’une approche immédiate et directe de la participation. Ce registre est à nouveau invoqué depuis plusieurs années pour réagir à la dominance techno-structurelle de nos sociétés, présente aussi au niveau communal49.
Préalablement, comme chez Rousseau, la redécouverte et l’enthousiasme pour les « communaux » procèdent d’une critique frontale des fondements de l’économie. Leur résurgence est présentée comme moyen de constituer un médium entre capitalisme financier et étatisme : capable ainsi de substituer la valeur du capital social à celle du capital économique ; capable encore, de renoncer à la fabrique standardisée du bien public par un État centralisé devenu exsangue [Rifkin, 2014]. De fait progressivement, le concept de « capabilité » des territoires répond de plus en plus au mal-développement de certains espaces et à l’abandon du faire par la puissance publique50. Émergents, les « communaux » actuels prennent les noms de « recycleries », de tiers lieux, de fab lab51, etc. : ils relèvent de l’initiative privée souvent accompagnée par le secteur public communal – ensuite subventionnée par le département ou par la région. La multiplication des maisons de santé ou de services, des lieux de sociabilité itinérants, etc. relève de la société des réseaux – et se connecte au premier d’entre eux, le numérique à accès libre.
Les tiers lieux sont en effet des espaces d’hybridation, à la fois de transmission de savoirs, mais aussi de production et d’échanges ; ils sont à la médiation entre privé et public, marchand et non marchand, petits pays et espace mondialisé de la data, etc. Ils procèdent d’abord d’une volonté de faire librement : les Makers de la société civile en sont les initiateurs. En France à l’heure actuelle, la proximité est très valorisée et avec elle, les artisans, commerçants, professions libérales, petites entreprises qui l’animent52 : déclaration d’intention nostalgique, ou réveil d’une volonté du faire local ? Au-delà du fait d’opinion, des dynamiques de production et de consommation sociales et solidaires semblent en cours, partant de l’échelon de sociabilité de proximité : le secteur communal. L’important est ainsi de noter l’ancrage de cette économie relevant souvent de l’innovation sociale – soit capable de répondre à des besoins sociaux non pourvus, du fait des défaillances du marché et des services publics53. Les pratiques ascendantes sont insérées dans des circuits courts : les monnaies locales réapparaissent ; les plateformes de partage se développent peu à peu – appartements, autos, outils, habits, œuvres d’art, etc. Émettons l’hypothèse que les « communaux » actuels, le sont au double sens du terme : comme système économique de substitution et comme échelle locale d’implication.
Bien sûr, leur rayon d’action peut s’élargir et la start up sociale ou économique peut devenir transnationale – ambiguïté de la notion d’économie collaborative – ; mais pour la plupart, à suivre notamment J. Rifkin, ces entreprises ont d’abord une pertinence locale, parce qu’un continuum production-consommation est valorisé54. Au nom de la transition écologique, il y a d’ailleurs intérêt à rompre avec les grandes échelles de production centralisée et les circuits de distribution planétaire qui leur correspondent. Ainsi vont les tentatives de résurgence de l’agriculture raisonnée voire « bio », de proximité ; mais de plus en plus, aussi de certains modes de production énergétique – éolien, hydraulique, solaire, biomasse, etc. –, qui auront un coût de production quasi nul et dont l’énergie pourra être reversée dans le réseau de proximité en temps réel, en fonction de l’Internet des objets… L’application numérique vient renforcer le partage instantané des biens et services à faible prix, leur fourniture étant le fait de « prosommateurs » – à la fois producteurs et consommateurs de la ressource ; d’abord insérés dans des échanges locaux, ils bénéficient cependant du réseau global du big data.
Dans l’économie du partage, la valeur d’accès se substitue progressivement à celle de propriété.
Comme le faire ensemble bourgeois des premiers temps s’appuyait sur une revendication d’autonomie de gestion politique, la consolidation probable de cette tierce économie « glocale » devrait être corrélée avec une dynamisation des pratiques participatives de proximité, car l’enjeu est sociopolitique autant qu’économique. Au regard du principe de subsidiarité, le secteur communal comme réseau institutionnel trouve toute sa pertinente à faciliter et à accompagner ces initiatives ascendantes : il peut être le centre de gravité des médiations configurant un nouveau modèle inclusif. Car « Ric » ou pas, les aspirations à plus de participation au quotidien sont recensées depuis quelques années dans les enquêtes d’opinion. Tout récemment encore, le Cevipof a pu remarquer : 80 % des sondés sont favorables au référendum local, autant à la mise en place d’un droit d’interpellation de l’équipe municipale, 72 % à l’instauration de budgets participatifs55. Les obligations se multiplient : constitution de conseils citoyens dans le cadre de la politique de la ville depuis 2014 – avec tirage au sort ; instauration de conseils de quartiers, de comités, de conseils de développement, de commissions de services publics… Ce sont autant d’occasions données, comme les concertations ouvertes (utilisant les techniques de jury, de conférences, etc.), d’impliquer les citoyens dans la décision publique de proximité. Souvent, l’innovation participative passe par la médiation numérique56. Parfois, les citoyens se retrouvent même dans la situation de coproduire le service : voici venu le temps du « prosommateur » public, capable par exemple de redessiner avec les agents, l’accueil d’une mairie, au vu des attentes et des possibilités de chacun. Les municipalités vont-elles être un jour en partie tirées au sort, ou à tout le moins, des techniques de participation et de contrôles directs seront-elles communément adoptées57 ? L’évaluation en continu des décisions va-t-elle devenir une culture ? Comment y préparer les élus, les « experts », les agents, les citoyens ?58 Ces défis devraient d’emblée occuper les municipalités en 2020, car il s’agit de préparer un futur déjà là et aussi, de redonner espoir, place et chance, aux déçus de la mondialisation heureuse59 ; un projet inclusif éminemment politique.
Olivier Rouquan
Politologue, constitutionnaliste
*Une identité est le fruit d’une logique de distinction, mais ne se construit pas forcément dans la guerre – elle est cependant souvent conflictuelle. Dans tous les cas, une stratégie identitaire puise les repères de sa régénération dans la mémoire d’un passé lointain et dans la revendication de valeurs et de symboles communs.
- Cf. Sébastien Segas, « Le bloc communal face aux politiques de la contrainte budgétaire : entre résistance et adaptation », dans ce numéro. ↩
- Sur le sens des réformes territoriales, cf. les interviews d’Éric Giuily et Claudy Lebreton dans ce numéro. ↩
- L’historien du droit remarque la trajectoire différente entre Angleterre et France avant le XIe siècle : après l’affaiblissement urbain dû aux invasions, la première royauté conserve des petites communes actives, là ou la seconde les abandonne aux pillages et au dépeuplement. Au XIe, ce qui reste des cités fortifiées y abrite des ruraux ou servent d’abris de passage…, Charles Petit-Dutaillis, Les communes françaises, Paris, Albin Michel, 1970, p. 24 et 111. ↩
- Les bourgeois recevaient l’autorisation, tout en gardant résidence dans la commune, de s’absenter parfois la moitié de l’année pour cultiver leurs champs… ↩
- Au Moyen Âge, pour l’artisanat et les cultures, le droit de la propriété est d’abord partagé ; puis, la privatisation des biens se diffuse très lentement à partir du XVIe et XVIIe, via le système des enclosures et le basculement dans une économie ouverte et motivée par les profits individuels. ↩
- Les « corps », fonctionnent de façon collective, sinon démocratique. Les atteintes au bien collectif sont rares et sanctionnées ; ainsi, chacun semble intégrer que la surexploitation des terres, outils, etc., à des fins individuelles est contreproductive. Cf. Jeremy Rifkin, La nouvelle société du coût marginal zéro, Paris, Babel, 2014, p. 236. ↩
- La commune se situe du côté de la solidarité plus organique que mécanique pour reprendre les catégories durkheimiennes ; ou de la Gemeinsshaft plutôt que Gessellschaft, pour reprendre celles de Tonnies. ↩
- Sur l’articulation des pouvoirs de justice : cf. par exemple la charte exemplaire de Saint-Quentin – 1195, Charles Petit-Dutaillis, op. cit.¸
pp. 56-59. ↩ - Pendant le XIIe siècle, le corps communal s’apparente parfois à l’échevinage, reliquat de l’institution carolingienne (scabinat) ; il n’y a pas d’institution communale type prescrite par les chartes, ibid. p. 49. ↩
- « Que, au XIIe siècle, la formation communale ait eu le plus souvent pour objet la sécurité,… qu’on ait surtout voulu en finir avec… les querelles et les outrages entre concitoyens,… et aussi les menaces qui écartaient les marchands étrangers et mettaient en conflit les gens de la ville et de la banlieue, c’est ce que prouvent les chartes… » ; Charles Petit-Dutaillis, op. cit., p. 85. Le terme communia trouve ainsi souvent un synonyme dans pax au sein de ces documents. ↩
- Ibid., p. 112 et suiv. Sur l’émancipation de la ville (et non de la commune) en Europe : cf. Patrick Le Galès, Le retour des villes européennes, Paris, Presses de Sc. Po., 2011, pp. 90-138. ↩
- Avec à leur tête, les maïeurs, terme proche de maire… ↩
- Ils détournent l’usage de la taille et sont qualifiés de « tripoteurs », achetant leur anoblissement avec l’argent des impôts. ↩
- Ainsi par exemple des établissements de Rouen, lorsque la moyenne bourgeoisie en accord avec les ouvriers drapiers, se sont rebellés en 1381-82 contre la haute bourgeoisie drapière ; quelques maisons furent brûlées et deux victimes décomptées, alors que les impôts locaux ne sont plus payés… Le roi essaie de pacifier la situation puis supprime la commune quelques temps plus tard. ↩
- En 1320 par exemple, le Parlement abolit la commune de Senlis en constatant : il y a « une grande dissension entre grands et petits… la commune était dommageable et inutile à l’état et à toutes les affaires publiques de la ville » ; Charles Petit-Dutaillis, op. cit., p. 143. Louis XI surveille les conseils, il augmente la taille, il s’immisce dans l’organisation des confréries, il désigne le maire…, ibid., p. 186. ↩
- Ibid., p. 201. ↩
- Dès le XIVe siècle, apparaissent par exemple les officiers fiscaux, puis ensuite, les surintendants, officiers des greniers à sel, lieutenants pour la police, présidiaux pour la justice, chambres des comptes, et bien sûr commissaires du roi, procureurs du roi (surveillance des délibérations)… ↩
- Le territoire, entendu ici comme espace politique relativement durable, lié au pouvoir politique central. ↩
- Philippe Tanchoux, « Les « pouvoirs municipaux » de la commune entre 1800 et 1848 : un horizon chimérique ? », Parlement[s ↩
- Cf. Sebastian Haffner, « La Commune de Paris », Commentaires, 2018/2, n° 162. ↩
- L’école dépend de la commune qui doit obligatoirement dépenser pour ses bâtiments et leur entretien depuis la loi de 1878. ↩
- Titre du film d’Yves Robert, 1962, et du livre de Louis Pergaud, 1912. Guerre surtout, entre le curé et « l’instit. » ; cf. Béatrice Compagnon et Anne Thévenin, Histoire des instituteurs et des professeurs, Paris, Perrin, 2001. ↩
- Une fois de plus, citons le périple intercommunal de ce tour de France par deux enfants de Me Fouillée, 1877. Rappelons également la politique autoritaire de la langue et la répression jusqu’aux années 80, des langues locales. ↩
- Cf., entre autres : Ernest Gellner, Nation et nationalismes, Paris, Payot, 1989 et Alain Dieckhoff, La Nation dans tous ses états, Paris, Flammarion – Champs, 2000. ↩
- Citons un film signifiant : La lutte des classes de Michel Leclerc, 2018. Jérôme Fourquet, L’archipel français, Paris, Seuil, 2019, pp. 93-119. ↩
- Eisenmann rappelle les trois conditions de la démocratie directe prônée par Rousseau : que la Cité soit petite ; qu’elle donne lieu à une certaine économie ; surtout, que les hommes soient éduqués en fonction de règles précises. Charles Eisenmann, « La cité de Rousseau », Coll., Pensée de Rousseau, Paris, Seuil – Points, 1984, p. 101. ↩
- Cf. Luc Rouban, « Les Français satisfaits de leurs communes rurales », enquête de l’Observatoire de la démocratie de proximité, Cevipof, septembre 2019. ↩
- Enquête sur les maires, Ipsos, Cevipof, AMF, 14 au 26 juin 2019, à partir d’un échantillon de 15 308 personnes, quotas, stratification. ↩
- Bouleversement conduisant au poujadisme dans les années 50 et contribuant à la montée du populisme dans les centres-bourgs aujourd’hui. David Goodhart, The Road to Somewhere: The Populist Revolt and the Future of Politics, C. Hurst & Co, 2017 ; l’auteur insiste sur la fracture entre nomades, acteurs optimistes de la mondialisation et sédentaires, qui la contestent et la subissent souvent. Remarquons cependant qu’au cœur des mégapoles, nichent les nomades les plus défavorisés, acteurs par nécessité et sans protection de flux migratoires dérégulés. Et puis les contestataires plus ou moins sédentaires, ne sont pas forcément traditionnalistes et populistes. ↩
- Rapport d’information, Roger Karoutchi et Jean-Pierre Sueur, Le phénomène urbain, un atout pour le futur, Paris, Délégation sénatoriale à la prospective, n° 117, 9 novembre 2016. ↩
- Cf. programme « centres-bourgs » conduit à partir de 2013 par le Commissariat général à l’égalité des territoires et désormais l’Agence française des territoires, l’ayant étendu en le renommant « cœur de ville ». ↩
- L’Insee définit le périurbain comme ensemble de communes dont 40 % des résidents travaillent dans un centre urbain à proximité ; à quoi il faut au moins ajouter la faible mixité fonctionnelle du bâti et la présence d’espaces à urbanisation diffuse.
Les ouvriers sont expulsés vers l’hinterland, tout comme l’industrie, installée désormais en zones rurales. Au-delà de logiques globales en couronnes, émerge une organisation des franges urbaines en réseaux polycentriques : des quartiers les plus pauvres subsistent en première couronne ; là, des communes rurales très riches nichent dans des périphéries lointaines…Hervé Le Bras et Emmanuel Todd, Le mystère français, Paris, Seuil, 2013 et pour une synthèse des problématiques : Jean-Pierre Decourcelle, Pierre Narring (coordonnateur) et Jérôme Peyrat, Requalifier les campagnes urbaines de France – Une stratégie pour la gestion des franges et des territoires périurbains, Paris, CGED, août 2015. ↩
- Céline Loudier-Malgouyres, « Le retrait résidentiel », Esprit, n° 393, mars-avril 2013. ↩
- Louis Chevallier, Classes laborieuses, classes dangereuses, Paris, Plon, 1958. ↩
- Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Sociologie de Paris, et Sociologie de la bourgeoisie, Paris, La découverte, 2004 et 2007. IAU, Gentrification et paupérisation au cœur de l’IDF, Paris, IAU, mars 2019. ↩
- Notamment frappée au coin du souvenir de la « Commune de Paris ». ↩
- Jérôme Porier, « À Paris, deux acheteurs sur trois sont cadres ou dirigeants d’entreprise », Le Monde, 3 mai 2016. Saskia Sassen, Expulsions, Paris, Gallimard, 2016, pp. 159-183. ↩
- Rapport annuel sur l’état du mal-logement en France, Fondation Abbé Pierre. En témoignent crûment les édifices menaçant ruine, sous la responsabilité du maire depuis le Moyen Âge – dont Marseille n’a pas le monopole. ↩
- La loi sur la mobilité durable a été adoptée le 10 novembre 2019. ↩
- Laurent Castaignède, Airvore ou la face obscure des transports, Paris, Ecosociété, 2018. ↩
- Temps de trajet moyen estimé à 42 mn – + de 60 % au-delà de 30 mn – Ipsos, Cevipof, AMF, op. cit. ↩
- Les maires sont confrontés directement aux propriétaires de terrains – pour qui l’artificialisation de l’espace est devenue une ressource déterminante –, et aux attentes fortes en matière de maison individuelle et de services de proximité. Ils vont sans doute obtenir, via la loi sur l’engagement dans la vie locale et la proximité de l’action publique, la décision d’un plan de secteur communal devenant élément de base du Plan local d’urbanisme intercommunal – PLUI… Par ailleurs, ils vont obtenir une meilleure représentation de « leurs petites communes » au sein des grandes intercommunalités, que l’on pourra éventuellement scinder. Autant de points qui risquent de fragmenter à nouveau l’approche de l’aménagement. ↩
- La police administrative générale est décentralisée et non déconcentrée – le statut particulier de Paris devant rejoindre la normalité. Prérogative du seul maire, elle n’est pas délibérée en conseil municipal. Son exercice doit être proportionné, le recours à l’interdit ne survenant qu’en dernier ressort. En fonction de la gravité et de l’étendue des dégâts, le préfet exerce la tutelle par substitution. ↩
- Cf. Ipsos, Cevipof AMF op. cit., juin 2019. ↩
- Sur cette question, cf. Olivier Rouquan, Culture territoriale, Paris, Gualino, 2016. ↩
- Cf. Enquête sur les maires, Cevipof, AMF, novembre 2019, vague 3, à partir d’un échantillon de 15 308 personnes, quotas, stratification. ↩
- La Commune de Paris procède de l’élection au suffrage universel direct de 92 délégués – incluant les représentants des beaux quartiers ; elle remplace le comité de la Garde nationale, qui siège début mars et s’oppose au Gouvernement parti à Bordeaux sur la question de la guerre, qu’elle veut poursuivre. La Commune établit une administration rétrospectivement qualifiable d’inspiration social-démocrate – loyers impayés annulés, prévision de gratuité et laïcité de l’enseignement, prévision d’aides aux syndicats et accords salariaux… Elle projette en fin de vie, soit au bout de deux mois qui se terminent dans le sang du fait de l’action de Thiers à la tête du Gouvernement de défense nationale, d’établir une Constitution valant pour l’ensemble du pays. Cette dernière eût été Fédération de villes et de municipalités, généralisant le modèle d’autonomie parisienne à l’ensemble de l’État. Un testament inachevé. Ce faisant, la Commune s’inscrit bien dans l’identité ancestrale connotant ce terme. Cf. Sebastian Haffner, « La Commune de Paris », Commentaires, 2018/1, n° 161, pp. 123-138. ↩
- Dominique Colas, Sociologie politique, Paris, PUF, 1994, pp. 443-444. ↩
- Paul Alliès, « Que sont nos notables devenus ? », dans ce numéro. ↩
- Jean-Luc Dubois et François-Régis Mahieu, « Sen, libertés et pratique du développement » et pour une approche critique de la « capabilité », Jérôme Ballet et François-Régis Mahieu, « Capabilité et capacité dans le développement : repenser la question du sujet dans l’œuvre d’Amartya Sen », Revue Tiers Monde, 2009/2 (n° 198). ↩
- Ce sont des labels normés librement par leurs inspirateurs, un fab lab obéit ainsi à l’objectif de fabriquer, au vu de logiciels et process libres. Il s’agit de prolonger le sens d’Internet, qui initialement crée du capital social, pas du capital économique. ↩
- « Les Français et la proximité », Ifop, U2P, 1 013 personnes, 10-11 septembre 2019. ↩
- CERDD, « Les nouveaux modèles économiques », Paris, CERDD, 2016. ↩
- Jeremy Rifkin, op. cit., pp. 137-149. ↩
- Enquête sur les maires, Cevipof, AMF, op. cit., septembre 2019. ↩
- Cf. Maryse Carmes, « Expériences CivicTech et territoires de proximité : les défis d’une métrologie citoyenne et éco-politique », dans ce numéro. ↩
- Droit d’inscription citoyen de sujets à l’ordre du jour passant par une rénovation du droit de pétition, jurys populaires, audit ouverts, etc. Cf. Médiacités, manifeste de 25 mesures pour une démocratie locale réelle, 2019. ↩
- Cf. interview de Claudy Lebreton, dans ce numéro. ↩
- 43 % des enquêtés disent vivre dans un territoire en difficulté – Enquête sur les maires, Cevipof, AMF, op. cit., juin. 2019. ↩